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Histoires Web samedi, juillet 27
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L’installation au Musée d’art contemporain de Lyon de deux cents œuvres de la collection privée d’Antoine de Galbert, fondateur de La Maison rouge, à Paris, qui fit, de 2003 à 2018, le bonheur des amateurs d’un art contemporain autre, des œuvres choisies avec les yeux et le cœur plutôt qu’avec les oreilles et le portefeuille, est d’abord l’occasion de rendre hommage à une profession méconnue du grand public, mais cheville ouvrière indispensable à un accrochage réussi, celle des régisseurs et des employés chargés du montage.

Car, si l’exposition est intitulée « Désordres », c’est non seulement parce que les choix du collectionneur témoignent d’une liberté d’esprit – fréquemment tous azimuts, ou réellement azimutée, comme on voudra – rare dans un univers hélas trop souvent moutonnier ou monomaniaque, mais aussi parce que la mise en place de certaines des œuvres relève, sinon de l’exploit, du moins du casse-tête ou de la reconstitution archéologique. On en prendra pour exemple la monumentale Opération rose (2004), du groupe Gelitin (Ali Janka, Florian Reither, Tobias Urban et Wolfgang Gantner). Ils ont imaginé une salle d’opération plutôt baroque et certainement pas aux normes modernes d’hygiène médicale.

Y accouche une créature monstrueuse et molle (elle est confectionnée en tissus roses rembourrés), sorte de lapine humanoïde, par ailleurs éviscérée… Des poupées de bébés en Celluloïd gisent dans des bassines en plastique, d’autres marinent dans des bocaux, des organes divers pendent à des crochets de boucher, le tout offrant un sérieux contraste avec des instruments chirurgicaux impeccablement chromés et une vitrine lumineuse destinée à lire les radiographies. Bref, un foutoir sans nom. Et c’est à ces valeureux régisseurs (nommons au moins ceux qui travaillent pour la fondation, Arthur Toqué, Camille Maufay, Antoine Champenois, et saluons les équipes du Musée de Lyon qui n’ont pas démérité) qu’il revient d’ordonner ce chaos.

Guerrier queer

Comme on a eu le privilège d’assister à l’accrochage, on a aussi apprécié le défi qu’a constitué la reconstruction d’une installation présentée en 2011 à La Maison rouge, dans l’exposition « My Winnipeg ». Il s’agit de The Collapsing of the Time and Space in an Ever-Expanding Universe dont le titre (« l’effondrement du temps et de l’espace dans un Univers en constante expansion ») est à lui seul un programme. Cette œuvre de l’Amérindien Kent Monkman, d’ascendance nehiyawak, peuple autrement nommé Cris, représente l’artiste, sculpture grandeur nature vêtue d’une robe de chambre rose, cheveux longs, yeux fardés et rouge à lèvres – il revendique son identité queer –, assis sur un fauteuil des plus classiques dans un intérieur bourgeois, regardant par sa fenêtre un paysage peint à la manière dont les artistes du Nouveau Monde figuraient le monde indien au XIXe siècle.

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