Je suis médecin généraliste et j’ai 30 ans. Ma courte expérience professionnelle, mais longue d’étudiante (sur les bancs de médecine à 17 ans), à l’hôpital et en cabinet, m’a confrontée quotidiennement aux conséquences du manque de médecins traitants : des patients aux urgences pour des complications évitables, des soins post-hospitalisation aléatoires en l’absence de suivi rapproché, des demandes chaque jour pour trouver un médecin traitant… Tout cela à Paris.
Face à l’urgence sanitaire, le projet de loi Garot à l’Assemblée nationale [un autre projet de loi, aux préconisations différentes, vient d’être voté au Sénat] vise à contraindre les médecins à s’installer dans des zones sous-dotées. Cela semble séduisant sur le papier : il s’agit de se saisir d’une ressource en pénurie, les médecins, et de les étaler un peu partout. Or si le médecin choisit de s’installer, c’est qu’il y a du travail, donc des patients.
Imposer un lieu d’exercice, c’est amputer la profession d’un élément fondamental de son attractivité. Demander à de jeunes médecins, après l’externat et l’internat, déjà jalonnés de sacrifices personnels, de s’installer dans un lieu fléché alors que leur vie a été construite ailleurs, sera contre-productif. Cela risque d’éloigner une génération entière du métier – au détriment direct des patients. Imposer n’est pas soigner : la coercition menace la profession médicale.
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