Meilleures Actions
Histoires Web lundi, mai 19
Bulletin

Sortie indemne d’un parcours législatif très chaotique, la proposition de loi de Gabriel Attal pour durcir la justice des mineurs a été définitivement adoptée, lundi 19 mai, au Parlement, après un ultime vote du Sénat, en attendant l’avis du Conseil constitutionnel sur plusieurs mesures contestées.

« Restaurer l’autorité » de la justice, « responsabiliser » les parents et « juger plus vite » les mineurs délinquants récidivistes : l’initiative de l’ancien premier ministre s’articule autour de ces trois promesses, formulées après les émeutes de l’été de 2023, impliquant de nombreux jeunes.

Près de deux ans plus tard, celui qui a pris la tête du parti présidentiel Renaissance est parvenu à faire aboutir son initiative, avec 223 sénateurs pour et 112 contre, lors de ce dernier vote qui ne faisait guère de doute dans un hémicycle dominé par une alliance droite-centristes qui soutient globalement le texte. L’Assemblée avait approuvé la proposition de loi à l’identique mardi 13 mai, par 341 voix pour et 187 contre.

Dans les deux chambres, l’ensemble de la gauche s’est opposée au texte, s’indignant à l’unisson des professionnels de la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) de mesures qui remettent en cause selon elle le principe même de la justice des mineurs : primauté de l’éducation sur la répression.

Lire aussi | Article réservé à nos abonnés Justice des mineurs : la philosophie répressive de la proposition de loi Attal braque magistrats et éducateurs

« Les jeunes de 2025 ne sont pas les jeunes de 1945 »

Le chef du groupe Ensemble pour la République (EPR) défend au contraire la nécessité de « revenir à des principes simples et clairs » et « d’adapter notre réponse pénale », car « les jeunes de 2025 ne sont pas les jeunes de 1945 », date de la parution de l’ordonnance fixant les règles de procédure pénale spécifiques aux mineurs en France.

« Le texte ne renverse pas l’équilibre de notre justice des mineurs. Il ne substitue pas la répression à l’éducation. Il les articule pour garantir que la réponse judiciaire soit à la fois rapide, adaptée et efficace », a justifié devant les sénateurs le ministre des relations avec le Parlement, Patrick Mignola.

La réforme prévoit notamment la création d’une amende civile pour les parents qui ne répondraient pas aux convocations aux audiences, ou encore la création très décriée d’une procédure de comparution immédiate pour les jeunes récidivistes à partir de 16 ans.

Autre dispositif phare : l’inversion du principe de « l’excuse de minorité », selon laquelle un mineur est sanctionné moins sévèrement qu’un majeur. A partir de 16 ans, cela deviendra l’exception qui devra être motivée par le juge et non plus la règle, pour les cas de récidive punis d’au moins cinq ans d’emprisonnement.

Plusieurs camouflets

Pour Gabriel Attal, ce succès parlementaire est bienvenu, près d’un an après une dissolution qui l’a subitement fait passer des projecteurs de Matignon au quotidien moins médiatique de la gestion du groupe parlementaire et de l’organisation du parti.

Newsletter

« Politique »

Chaque semaine, « Le Monde » analyse pour vous les enjeux de l’actualité politique

S’inscrire

Le député des Hauts-de-Seine, discret ces derniers mois à l’Assemblée, revient même de très loin avec son texte de loi. Son examen a en effet été marqué par plusieurs camouflets, et ce, dans les deux chambres du Parlement.

A l’Assemblée, des mesures phares avaient été supprimées en commission, avant de renaître en séance publique. Même scénario au Sénat, où le rapporteur Francis Szpiner, membre des Républicains alliés à Renaissance dans la coalition gouvernementale, avait exprimé un regard plus que critique sur ce texte, craignant « une loi de circonstance » écrite « sous le coup de l’émotion », « inutile » et « inapplicable ».

Lire le décryptage | Article réservé à nos abonnés Justice des mineurs : l’option répressive de Gabriel Attal

Mais l’alliance gouvernementale s’est démenée pour sauver l’initiative et préserver l’essentiel des mesures-clés, grâce notamment à la mobilisation du garde des sceaux, Gérald Darmanin, partisan du texte.

Cela n’a pas éteint la colère de la gauche, qui s’est unie à la protection judiciaire de la jeunesse pour qualifier ces mesures de « populistes, simplistes, répressives » voire « dangereuses ».

Socialistes, écologistes et « insoumis » ont d’ailleurs promis de saisir le Conseil constitutionnel sur de nombreuses mesures, espérant les voir censurées au motif, précisément, qu’elles contreviendraient aux droits de l’enfant et aux principes qui fondent la justice des mineurs.

Le « seul résultat évident » de ce texte sera « de fragiliser une nouvelle fois notre Etat de droit », a regretté la sénatrice socialiste Corinne Narassiguin, dénonçant un « gadget de M. Attal » qui « sali[ra] les principes républicains ».

Lire aussi | Article réservé à nos abonnés « L’attention portée aux enfants est l’un des leviers les plus efficaces pour lutter contre la violence »

Le Monde avec AFP

Réutiliser ce contenu

Share.
© 2025 Mahalsa France. Tous droits réservés.