Servir avec précision. Monter au filet. Glisser sur la terre ocre. Frapper la balle. A en croire l’état de forme de Jannik Sinner, la terre battue, ça ne s’oublie pas. Même lorsqu’on a été éloigné du circuit pendant trois mois. L’Italien a été suspendu entre février et mai, dans le cadre d’un accord conclu avec l’Agence mondiale antidopage, après deux contrôles antidopage positifs à un anabolisant (en mars 2024), attribués à une contamination accidentelle.
Sur le cours central, le triple vainqueur de tournois du Grand Chelem s’est employé à faire oublier cette sanction, dimanche 18 mai. Sous les encouragements nourris du public, le droitier de 23 ans a d’abord tenu tête à Carlos Alcaraz en finale du Masters 1000 de Rome. L’Italien s’est procuré deux balles de set dans le premier acte, avant de déchanter dans le deuxième set (7-6 [7-5], 6-1). L’Espagnol, numéro 3 mondial, plus relâché et bien inspiré, enregistre un quatrième succès d’affilée contre l’Italien (en 12 confrontations), qui pourrait être son plus grand rival à Roland-Garros (25 mai-8 juin). Alcaraz a aussi mis fin ce dimanche à une série de 26 victoires de Sinner.
Malgré cette défaite, ce retour à domicile s’apparente à une marche triomphale pour ce dernier, qui jouit d’une grande popularité en Italie. Près de 10 800 supporteurs ont célébré, dimanche, la présence en finale du Transalpin, dont le motif de l’absence − qui aurait pu lever des réserves − n’a pas semblé poser problème outre mesure.
Alcaraz « heureux de le voir revenir sur le circuit »
Plus surprenant, les autres joueurs du tournoi semblent s’être mis au diapason. Oubliées, les saillies de Nick Kyrgios et de Novak Djokovic, qui avaient déploré que l’Italien ait été hâtivement blanchi, se soit vu infliger des sanctions trop légères et des condamnations à peine formulées de la part des instances du tennis. Avant la finale, Carlos Alcaraz a ainsi salué le retour en force de son adversaire : « C’est incroyable. J’ai été heureux de le voir revenir sur le circuit. » Tout comme son adversaire en demi-finales, l’Américain Tommy Paul : « Il n’est pas numéro 1 pour rien. »
Une bienveillance qui ouvre la porte à un début de rédemption pour Sinner. Non pas que son statut de numéro 1 mondial ait été inquiété. Pas plus que sa présence en Grand Chelem. Mais, à quelques semaines de Roland Garros (25 mai-8 juin), l’Italien a pu sonder l’accueil qui lui serait réservé et se rassurer quant à son état de forme. « J’espère voir où j’en suis et ce que je dois améliorer », annonçait-il au début du tournoi, après avoir repris officiellement l’entraînement le 13 avril.
Cette pause forcée ne semble d’ailleurs pas avoir diminué Sinner. Ce dernier a ainsi surclassé le Norvégien Casper Ruud en quarts de finale (6-0, 6-1). Le numéro 7 mondial, finaliste en 2023 à Roland Garros et récent vainqueur du Masters 1000 de Madrid, a expliqué en zone mixte n’avoir jamais rien vu de tel : « C’est le plus proche de la perfection dont j’aie été le témoin sur un court contre un joueur. (…) C’était comme jouer contre un mur qui vous renvoie les balles à 100 000 à l’heure tout le temps. C’était tout simplement impressionnant. » D’autant plus impressionnant que la terre battue reste, jusqu’à présent, la surface la plus fragile de l’Italien.
« Nous avons essayé de tirer le meilleur de ces trois mois et de voir le verre à moitié plein, expliquait, auprès de L’Equipe, son entraîneur, Simone Vagnozzi. Même si j’ai été surpris d’entendre certains dire que cette pause était un avantage. Je n’ai jamais vu quelqu’un choisir de s’arrêter trois mois entre l’Open d’Australie et le tournoi de Rome. »
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Même le pape Léon XIV, qui l’a reçu au Vatican cette semaine, semble avoir absous ce sinner (« pécheur », en anglais). Délesté de ses doutes mais pas encore au niveau de Carlos Alcaraz, l’Italien a désormais quelques jours pour ajuster la mire avant son prochain objectif : « Paris. »