Comme les rutabagas, la chicorée résumait les amères privations de temps de guerre, dans les souvenirs de nos grands-mères. Ironie de l’histoire alimentaire : l’ersatz de café honni sous l’occupation allemande, concocté à partir des racines d’une plante de la même famille que celle des endives (astéracées), se sirote désormais avec un nuage de lait mousseux, évidemment végétal, dans les coffee shops les plus courus des métropoles. Et une chicorée latte lait d’avoine, une !
Ces deux ou trois dernières années, seule ou accompagnée de céréales torréfiées, la chicorée a pris un de ces coups de jeune spectaculaires dont le marketing a le secret. Certes, grâce à la marque Ricoré, la chicorée est « l’amie du petit déjeuner » des Français depuis 1953, constamment généreuse en revenus pour le groupe Nestlé. Avant même le débarquement de l’agroalimentaire américain, les Nordistes cultivaient, torréfiaient, se délectaient des racines de Cichorium – voilà cent soixante-cinq ans, par exemple, que la chicorée Leroux est fabriquée à Orchies (Nord).
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