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Histoires Web vendredi, novembre 29
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Cette journée-là est devenue son « enfer ». Il n’en sort pas. Ismail Snabi est séquestré par un souvenir de vacances qui le rend « fou ». Dans son salon gris comme son humeur, ce Franco-Marocain de 28 ans ressasse son histoire tel un derviche traumatisé. « Je ne m’attendais pas à cela », souffle Israa, son épouse. Le 5 septembre, il a pu rentrer chez lui, à Clichy-sous-Bois (Seine-Saint-Denis), auprès de ses trois garçons (6 ans, 4 ans et 3 ans), après une année emprisonné en Algérie.

Le 29 août 2023, ce garagiste a été arrêté par une unité de gardes-côtes algériens alors qu’il naviguait en scooter des mers avec trois de ses proches. Aux alentours de 20 heures, les quatre hommes, à court d’essence, se seraient perdus dans la brume dans les eaux territoriales algériennes alors qu’ils cherchaient à revenir, après une longue sortie en mer, vers la marina de Saïdia, ville frontalière de l’Algérie au nord-est du Maroc.

L’erreur va être fatale à Bilal Kissi, Franco-Marocain de 28 ans, et Abdelali Mchiouer, un ressortissant marocain de 40 ans installé en banlieue parisienne, tués ce soir-là par des tirs attribués à la patrouille algérienne. Mohamed Kissi, 33 ans, frère de Bilal, réussit à s’enfuir à la nage et à retrouver sa famille au Maroc. Ismail est emmené par les militaires. « J’ai perdu deux frères pour rien, répète-t-il en tirant sur une énième cigarette. Je ne veux même pas me souvenir de cette journée, elle avait pourtant très bien commencé », confie-t-il avant de la détailler au Monde.

« Je me dis qu’ils vont nous aider »

Il est 17 heures. Le ciel est d’un bleu insolent, la mer plate comme un lac. Avec ses amis, ils se rendent en jet-ski au Cap-de-l’Eau, village de pêcheurs situé à une vingtaine de minutes à l’ouest de Saïdia. Là-bas, ils s’arrêtent à un restaurant de plage : thé, jus, poisson, baghrirs (sorte de crêpes)… Le moment est hlou (sucré en arabe) et léger.

Il est tard, il faut déjà rentrer. Ismail Snabi et Mohamed Kissi conduisent chacun un scooter des mers tandis que son frère Bilal et Abdelali Mchiouer en partagent un troisième. « On fait des tours, des Snapchat. Puis, la nuit tombe, la brume se lève », se rappelle Ismail Snabi. Tous pensent alors se diriger vers la marina ; mais le chemin du retour est long, un peu trop à leur goût. « Je m’arrête et je dis à Mohamed qu’on s’est trompés. On voit juste un truc blanc au loin, il n’y a pas de panneau en mer », pointe-t-il.

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