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Histoires Web samedi, octobre 26
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« On dit que tous les goûts sont dans la nature, mais c’est pas vrai : les gens ont tous les mêmes », me disait, au début des vacances de la Toussaint, une amie qui tient des chambres d’hôte dans le Gers. Ses visiteurs sont sensibles aux mêmes détails. Preuve en est, la similarité des appréciations qu’ils laissent en ligne.

Airbnb a 16 ans, les plateformes d’échange d’appartements deux fois plus. Autant d’années pendant lesquelles des particuliers louant ou échangeant leur logement pour les vacances ont peaufiné cette expertise consistant à accueillir des gens qu’ils ne connaissent pas en faisant ­semblant de les connaître. Autant d’années pendant lesquelles des bouteilles de cidre ont été offertes (le cidre, ça fait local, c’est pas cher et pas trop alcoolisé).

Mais l’enchantement par la convivialité s’est codifié ; avoir des attentions personnalisées réclame désormais un surcroît de créativité. « Préparez la maison comme pour recevoir des amis : faites du rangement, du ménage et un peu de place pour leurs affaires ! », dit le mail qu’envoie HomeExchange à ses hôtes une semaine avant l’arrivée de leurs invités. Il précise aussi : « Pas besoin de vous attaquer frénétiquement à la poussière en haut des armoires, faites comme si vous accueilliez des amis ou de la famille. » La ­différence entre sincère hospitalité et service de conciergerie tient donc à un peu de poussière en haut des meubles.

A quoi on les reconnaît

A l’annonce de l’arrivée de visiteurs, ils ramassent frénétiquement tout ce qui dépasse et entassent leur bazar dans un petit débarras dont ils ferment la porte à clé. Ils vident quelques placards, « pour leur faire de la place », mais jamais les tiroirs (qui voyage avec ses papiers ?). Ils descendent des grands sacs d’affaires à la cave qu’ils oublieront de remonter après le départ des invités. Ils se découvrent des racines régionales et décident de laisser sur la table un panier d’herbes de Provence, de savon de Marseille, de gâteau breton ou de n’importe quoi qui prouve qu’ils sont de quelque part. Quand arrive l’échéance, dépassés par le défi des rangements, ils ajoutent une phrase à leur profil sur la plateforme de location ou d’échange, du type : « Ceci n’est pas un meublé mais notre résidence principale. C’est donc une maison vivante. » Ils ne précisent pas qu’ils n’ont pas fait la poussière.

Comment ils parlent

« La cuisine, bien dégagée ! » « On vide un placard par chambre et on entasse tout dans un autre. » « Je refais toujours un tour deux heures avant l’arrivée des invités, c’est comme ça que j’ai enlevé une souris morte dans la salle de bains. » « Il faut passer un quart d’heure à l’arrivée et au départ avec eux pour discuter. » « Je mets des livres dans les chambres, genre Le Petit Prince et un bouquin en anglais. De toute façon plus personne ne lit. » « Heureusement que j’habite en Normandie. La boisson locale, c’est du cidre. J’en laisse une bouteille, avec du jus de pomme bio auquel personne ne touche. » « Je laisse un pot de confiture faite maison, mais pas par moi. » « Si tu écris un petit mot, faut le rédiger à la main et le signer seulement par un prénom, c’est plus intime. » « Quelqu’un a mis en commentaire qu’il avait apprécié les petits gâteaux. J’ai peur de devoir en mettre pour tout le monde, maintenant. » « Tu dis : “N’hésitez pas à me déranger”… il y en a quand même quelques-uns qui le feront. »

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