Les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR) et une coalition de groupes armés et politiques du Soudan ont signé, dans la nuit, « une charte fondatrice » visant à la création d’un gouvernement parallèle dans leur pays ravagé par la guerre, a affirmé, tôt dimanche 23 février, une source proche des signataires à l’Agence France-Presse (AFP). Ce, au terme de nombreux reports et d’une grande confusion cette semaine, sur fond de tensions diplomatiques avec le Kenya.
La charte a été signée dans la nuit de samedi à dimanche lors d’une réunion tenue à huis clos dans la capitale kényane, Nairobi, au terme de nombreux reports et d’une grande confusion cette semaine, sur fond de tensions diplomatiques. « C’est fait », a déclaré à l’AFP la source anonyme, soulignant que le but est la création d’un « gouvernement de paix et d’unité » dans les zones du Soudan contrôlées par les rebelles. Selon le texte, ils entendent créer un gouvernement qui visera à mettre fin à la guerre et à assurer l’accès sans entrave à l’aide humanitaire.
Les Forces civiles unifiées, une large coalition comptant des partis politiques, des représentants de la société civile et des factions armées, a confirmé la signature à l’AFP, de même qu’un deuxième protagoniste, Alaa El-Din Nuqd, un représentant des syndicats soudanais. Najm al-Din Drisa, porte-parole des Forces civiles unifiées, a déclaré à l’AFP que ce gouvernement parallèle pourrait être formé « d’ici un mois » et que cette formation aurait lieu « au Soudan ».
Plus de 12 millions de déplacés
Une faction du Mouvement populaire de libération du Soudan-Nord (SPLM-N) dirigée par Abdelaziz al-Hilu et qui contrôle des parties des Etats du Kordofan et du Nil-Bleu a également signé le texte consulté par l’AFP. Mohamed Hamdan Daglo, chef des FSR, n’était pas présent mais son frère et numéro 2 des paramilitaires Abdel Rahim Daglo, a signé le document.
Dans le document, consulté par l’AFP, les signataires s’engagent à « construire un Etat laïque, démocratique, décentralisé, fondé sur la liberté, l’égalité et la justice, sans parti pris » culturel, ethnique, religieux ou régional. Le texte appelle également à la création d’une « nouvelle armée nationale, unifiée, professionnelle », qui refléterait « la diversité et la pluralité » de l’Etat du Soudan.
Le conflit qui oppose les FSR à l’armée régulière soudanaise depuis près de deux ans a fait des dizaines de milliers de morts, déplacé plus de 12 millions de personnes et engendré un désastre humanitaire. La guerre a déchiré le pays, l’armée contrôlant l’est et le nord du Soudan, et les FSR dominant la quasi-totalité de la région occidentale du Darfour et des pans sud du pays. Ces dernières semaines, l’armée a mené une offensive dans le centre du pays, reprenant des villes-clés et la quasi-totalité de Khartoum, la capitale. La démarche politique des FSR vise selon les experts à renforcer leur contrôle sur le Darfour.
Cette démarche pourrait accroître la « fragmentation » du pays et « aggraver la crise », a mis en garde mercredi le porte-parole du secrétaire général de l’ONU. La Ligue arabe a elle condamné jeudi « toute mesure susceptible de porter atteinte à l’unité du Soudan ou de l’exposer au risque de la division ou la fragmentation ».
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L’armée et les FSR sont accusées de crimes de guerre, mais les paramilitaires se distinguent par des exécutions de masse à caractère ethnique, des violences sexuelles et de graves violations des droits humains sur leurs territoires. L’Union africaine a qualifié le conflit de « pire crise humanitaire au monde », avec des centaines de milliers d’enfants qui souffrent de malnutrition sévère aiguë.
Jeudi, le gouvernement soudanais a rappelé son ambassadeur au Kenya pour protester contre l’initiative, accusant son président, William Ruto, d’agir selon « ses intérêts commerciaux et personnels avec les sponsors régionaux de la milice », faisant manifestement allusion aux Emirats arabes unis. Abou Dhabi est régulièrement accusé de soutenir les FSR, ce que la fédération émiratie dément.
Le mois dernier, le Kenya et les Emirats arabes unis ont signé un accord économique qualifié de « jalon historique » par la présidence kényane. Mercredi, le ministère kdes affaires étrangères kényan avait défendu son choix, affirmant que l’organisation de l’événement était « compatible avec le rôle du Kenya dans les négociations de paix, qui l’oblige à offrir des plateformes impartiales aux parties en conflit pour rechercher des solutions ».