Histoires Web lundi, mars 17
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Eberlués et choqués par l’attitude de Donald Trump qui, jour après jour, contribue à creuser le fossé entre les Etats-Unis et l’Europe, les Français ont compris qu’ils étaient entrés dans la « nouvelle ère » évoquée, le 5 mars, par Emmanuel Macron. Les enquêtes d’opinion réalisées après l’allocution du président de la République convergent. Solennellement alertés à propos du risque d’abandon de l’Ukraine, ils se montrent très inquiets, ne minimisent en rien la menace russe et comprennent la nécessité du réarmement dans laquelle la France, comme ses partenaires européens, se trouve engagée pour tenter d’assurer la sécurité du continent européen.

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Qui dit changement d’ère dit changement de logiciel. Tout est à repenser à l’aune de la souveraineté européenne qu’il faut construire et consolider. Les trous sont béants et des dizaines de milliards d’euros vont devoir être mobilisés pour muscler la défense, mais aussi l’innovation, la recherche, la transition écologique, l’industrie, au prix de choix douloureux et de réorientations massives.

La France n’aborde pas ce tournant dans les meilleures conditions. Elle est handicapée par sa dette, l’une des plus élevées de la zone euro, le niveau de ses déficits publics, l’état de division dans lequel se trouve sa représentation nationale et la faible dynamique dont dispose le gouvernement. Tout juste François Bayrou est-il parvenu, après la chute du gouvernement Barnier, à faire voter un budget et une loi de financement de la Sécurité sociale qui restent largement déficitaires. L’essentiel reste à faire.

Sur le fond, la convergence entre les deux têtes de l’exécutif ne fait guère de doute. Leur objectif est de mettre le pays en situation de produire davantage pour réduire ses dépendances vis-à-vis de l’extérieur et assurer la pérennité d’un modèle social qui ne s’équilibre plus. Il y a cependant un nœud à dénouer : la retraite à 64 ans, devenue à la fois le symbole du « travailler plus » défendu depuis 2022 par Emmanuel Macron et l’objet d’une vive contestation sociale. Les syndicats et les partis de gauche font de son retrait l’enjeu d’une « réparation démocratique » sans laquelle, disent-ils, le pays ne pourra aller de l’avant.

Pressé par le président de la République de tirer sans tarder les conséquences de la nouvelle donne mondiale, vivement pris à partie par l’un de ses prédécesseurs, Edouard Philippe, qui lui reproche d’être à contretemps, François Bayrou défend sans relâche sa méthode qui vise à remettre dans le jeu les partenaires sociaux tout en faisant un intense travail de pédagogie auprès des Français pour tenter de leur faire partager la contrainte. Trois arguments plaident en sa faveur : la défiance politique est à son zénith, un fossé s’est creusé depuis sept ans entre le sommet et la base, l’extrême droite est en embuscade. Marine Le Pen, prise à revers par la séquence internationale, guette le moindre faux pas social pour se remettre en selle.

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Par petites touches, François Bayrou rétrécit le champ des possibles. Dimanche 16 mars, sur France Inter, il a exclu le retour à la retraite à 62 ans ainsi que les hausses d’impôts revendiquées par la gauche, au risque de perdre une partie de ses faibles soutiens. C’est la limite de la méthode douce qu’il préconise : au lieu de créer du consensus, elle peut, au contraire, le dévitaliser et donner prise aux critiques de ceux qui lui reprochent de vouloir surtout gagner du temps.

Le Monde

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