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Histoires Web lundi, juillet 8
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Sobre et raffinée dans son joli pantalon de lin blanc rehaussé d’un gilet en maille rose vif, Susanna Mälkki ressemble à l’héroïne poétique d’un film d’Ingmar Bergman, qui pourrait s’intituler « Portrait de femme un soir d’été ». La cheffe d’orchestre finlandaise rentre d’une longue journée de répétition à Venelles, dans l’un des studios dont dispose le Festival d’Aix-en-Provence, à 15 kilomètres au nord de la ville. L’Orchestre de l’Opéra national de Lyon, qui assure la reprise du Pelléas et Mélisande de Debussy mis en scène par Katie Mitchell en 2016, n’est pas encore arrivé. C’est le temps du travail scénique avec les chanteurs. Susanna Mälkki ne raterait pour rien au monde ce passage de la musique et des mots dans l’incarnation des corps en mouvement. « C’est une œuvre d’une telle profondeur !, s’exclame-t-elle, encore transportée. Nous n’arrêtons pas de nous dire que nous avons une chance incroyable d’approcher cette musique qui brasse toutes les émotions humaines autour du mystère de la vie, de l’amour, de la mort. »

Pelléas est la deuxième production aixoise de la Finlandaise, après la magistrale création d’Innocence, en 2021, dernier opus lyrique de sa compatriote, la compositrice Kaija Saariaho, disparue le 2 juin 2023 à l’âge de 70 ans. Le regard de la musicienne se fait grave. « Je pense à elle tous les jours, confie-t-elle. Je la considérais un peu comme ma grande sœur, et c’était aussi devenu une amie. Grâce à elle, j’ai fait mes débuts au Metropolitan Opera de New York en 2016, alors que son premier opéra, L’Amour de loin, entrait au répertoire dans la mise en scène de Robert Lepage. » Revenue au Met en 2022 pour The Rake’s Progress, de Stravinsky, Susanna Mälkki sera à nouveau à l’affiche la saison prochaine, avec le Fidelio de Beethoven. De nouveaux horizons, après un début de parcours consacré à la musique contemporaine.

Lire la nécrologie : Article réservé à nos abonnés Kaija Saariaho, figure de proue de la musique contemporaine, est morte

En 2006, Susanna Mälkki est une quasi-inconnue en France lorsqu’elle devient, à 36 ans, la première femme nommée à la tête du très boulézien Ensemble intercontemporain (EIC), orchestre de chambre d’une trentaine de musiciens solistes cooptés par le patron fondateur de l’Institut de recherche et coordination acoustique/musique (Ircam). La candidate à la succession de Péter Eötvös et David Robertson n’a jusqu’alors dirigé l’EIC qu’une seule fois, au Festival de Lucerne (Suisse), en 2004, mais son calme, sa détermination et son talent font l’unanimité et emportent l’adhésion d’un collège de personnalités présidé par Pierre Boulez. « Nombre de choses importantes dans ma vie me sont advenues via les compositeurs, souligne-t-elle. Boulez et moi, on se comprenait : sur sa recommandation, j’ai été invitée très jeune par l’Orchestre de Chicago. Quant à Luca Francesconi, dont j’ai dirigé la création de Quartett d’après Heiner Müller, je lui dois ma première invitation à la Scala de Milan, en 2011. »

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