La procureure de Paris, Laure Beccuau, a défendu vendredi 6 juin le choix des juges de faire venir à Paris Mohamed Amra afin qu’il soit entendu au sujet de son évasion sanglante de 2024, un choix qui a suscité des critiques de syndicats pénitentiaires et les réserves du ministre de l’intérieur, Bruno Retailleau, évoquant « des risques majeurs ».
Il y a environ un an, alors que le narcotrafiquant, mis en examen, était transféré vers Rouen pour un interrogatoire judiciaire, des hommes cagoulés et armés avaient tué deux agents pénitentiaires qui se trouvaient à bord du fourgon qui le transportait, au niveau du péage d’Incarville (Eure). Il s’était alors évadé et n’avait été retrouvé que neuf mois plus tard, en Roumanie en février 2025. Une quarantaine de personnes, dont le narcotrafiquant, sont mises en examen dans ce dossier. Le 28 mai, deux nouveaux suspects ont été placés en détention provisoire, et un troisième, sous contrôle judiciaire, selon une source judiciaire confirmant une information de TF1.
« L’idée qu’on l’extraie pour le faire voyager dans un véhicule pénitentiaire, c’est la reviviscence de l’attaque effroyable d’Incarville », a reconnu la procureure sur BFM-TV/RMC. « C’est, chez les agents pénitentiaires, la crainte que les faits se reproduisent ». Ceux-ci plaidaient plutôt pour un déplacement des juges d’instruction dans la prison ultrasécurisée de Condé-sur-Sarthe (Orne), où le narcotrafiquant est détenu, ou pour une audition en visioconférence.
Si les juges d’instruction de la juridiction nationale de lutte contre le crime organisé ont choisi de le faire venir la semaine prochaine au tribunal judiciaire de Paris, c’est « parce qu’ils veulent désormais que le dossier avance vite », a affirmé Mme Beccuau. « Ce sera la première audition de Mohamed Amra (…). Ça va être le temps de ses premières déclarations. On va peut-être lui opposer des pièces de procédure, des scellés. Il faut qu’il soit enregistré », a-t-elle expliqué.
« Vous n’imaginez évidemment pas trois magistrats instructeurs se déplacer avec l’intégralité des scellés. Et puis il faut aussi des conditions d’audition sur un interrogatoire qui va durer longtemps », a-t-elle poursuivi, expliquant que seront présents Mohamed Amra et les autres suspects, mais aussi leurs avocats, les escortes, les trois juges d’instruction et les greffiers, et qu’il faudra des caméras pour filmer tout le monde.
Mohamed Amra sera escorté par le GIGN, unité d’élite de la gendarmerie. S’il devait, plus tard au cours de l’instruction, être confronté à d’autres mis en examen, il pourrait potentiellement être extrait à nouveau, selon Mme Beccuau.