Doria Tillier l’assure, elle n’a fait la connaissance d’Iris qu’après que Canal+, en la personne de Maxime Saada, le président du directoire de la chaîne, lui eut passé la commande très vague d’un projet. « Il avait vu mon court-métrage La Diagonale des fous, se souvient la génitrice d’Iris, et l’avait aimé au point de l’acheter. On m’a dit “propose quelque chose”, j’ai demandé qu’on me fixe une deadline. »
Le personnage central est né de cette contrainte désirée et du constat affligé que « les gens disent n’importe quoi pour éviter de n’être pas d’accord », établi par Doria Tillier au fil d’une carrière bien remplie (Miss Météo sur Canal+, Madame Adelman au côté de Nicolas Bedos, mère indigne de Kimmy Diore dans Les enfants sont rois, pour poser quelques jalons).
Iris, institutrice, autrice pour la jeunesse en devenir, fonctionne à rebours de cette pratique. Sa propension à exprimer sincèrement son opinion, sur les talents culinaires de l’amie qui la reçoit ou sur la pertinence des conseils de son éditeur, par exemple, complique sa vie – amoureuse, professionnelle, sociale. « Des gens m’ont dit qu’ils la trouvaient odieuse », confie l’interprète et réalisatrice, surprise. C’est vrai qu’Iris est attendrissante, travaillée par la mauvaise conscience lorsqu’elle constate les effets de son addiction à la vérité sur ses proches.
Du burlesque à la mélancolie
Doria Tillier lui trouve un lien de parenté avec Larry David, auteur et personnage central de Larry et son nombril (Curb Your Enthusiasm), le misanthrope hollywoodien qui vient de tirer sa révérence au bout de douze saisons. « Je ne trouve pas Larry David odieux, il est spontané », précise Doria Tillier, avant de citer une phrase « d’un auteur anglais » (Horace Walpole) qu’elle s’excuse d’avoir utilisé lors d’autres interviews : « Le monde est une comédie pour ceux qui pensent, une tragédie pour ceux qui ressentent. »
« Iris oscille entre les deux, poursuit-elle, et cette oscillation définit le ton de la série. » C’est ainsi que l’on peut passer du burlesque (une fabuleuse séquence dans une soirée mondaine) à la mélancolie du dernier épisode.
La comédie selon Doria Tillier, « c’est le langage qui m’intéresse, celui que je préfère pour faire passer des messages » – et l’un des messages qu’elle veut faire passer concerne l’amour. Dans la série, Iris croise (littéralement sur un trottoir, la nuit) un homme qui pourrait être son père. Ce personnage est incarné par François Morel, inattendu et parfaitement juste.
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