Au cœur de vastes manœuvres depuis l’entrée surprise de la compagnie saoudienne STC, le géant espagnol des télécoms, Telefonica – dont l’Etat est redevenu un actionnaire majeur –, a annoncé samedi 18 janvier un changement surprise à sa tête pour ouvrir une « nouvelle étape ».
En poste depuis 2016, José Maria Alvarez-Pallete, dont le mandat arrivait à échéance cette année, a été remplacé à la présidence exécutive du groupe par Marc Murtra, qui était jusqu’ici président de la société espagnole de conseil et de technologie Indra, dont l’Etat est l’actionnaire de contrôle.
Telefonica, qui a entériné cette décision lors d’un conseil d’administration extraordinaire convoqué en urgence, l’a expliquée par la volonté « de certains actionnaires importants » du groupe d’entamer « une nouvelle étape ».
Ancien opérateur historique des télécoms en Espagne, Telefonica vit une période mouvementée depuis l’entrée dans son capital du groupe saoudien STC, qui a acquis 9,9 % de l’opérateur en septembre 2023. Cette opération surprise avait suscité l’inquiétude du gouvernement de gauche espagnol, qui avait annoncé en retour une prise de participation de 10 % du géant des télécoms par le fonds public SEPI (Sociedad Estatal de Participaciones Industriales), sorti du capital de Telefonica en 1997.
Le gouvernement du socialiste Pedro Sanchez avait justifié cette opération par l’importance stratégique de Telefonica, notamment dans le champ militaire, le groupe offrant des services de télécommunications à l’armée espagnole.
Le fonds public SEPI contrôle Indra dont provient Marc Murtra, qui est, selon la presse économique espagnole, considéré comme un proche du gouvernement.
Le groupe bancaire espagnol La Caixa, qui possédait initialement 2,69 % de l’opérateur, a également porté ces derniers mois sa participation dans Telefonica à 9,9 %, via sa société holding d’investissement Criteria Caixa, pour se hisser au niveau de l’Etat espagnol.
« Une nouvelle intempestive »
Après l’annonce de ce changement surprise à la tête du géant espagnol, le syndicat UGT, l’un des principaux du pays, a fait part de ses doutes face à « une nouvelle intempestive » et dit espérer que « la SEPI clarifie les raisons » de cette décision.
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Cuca Gamarra, responsable du Parti populaire (droite), principale formation d’opposition, a elle exigé des « explications » du gouvernement qu’elle a accusé de vouloir « coloniser les entreprises privées ».
Telefonica fait aussi face à une concurrence accrue dans un marché espagnol en pleine restructuration avec la fusion d’Orange et de MasMovil, et la vente de Vodafone Espagne au fonds britannique Zégona.
A cause de son lourd endettement, le groupe a entamé il y a quelques années un changement stratégique majeur en se recentrant sur ses quatre principaux marchés (Espagne, Allemagne, Royaume-Uni et Brésil) pour améliorer sa rentabilité. Il a également commencé à réduire ses effectifs à la fin de l’année dernière, supprimant 3 400 emplois sur les 16 500 qu’il compte en Espagne.
En juillet, Telefonica avait confirmé ses objectifs financiers pour 2024 après avoir vu son bénéfice net grimper de 29 % au premier semestre, notamment grâce à de bonnes performances commerciales en Espagne.