Chaque traducteur a sa tanière. Celle d’Eric Boury se trouve à l’étage d’une maison aux volets rouges de Sainte-Sévère-sur-Indre, un village à 50 kilomètres au sud de Châteauroux. Il peut s’enfermer jusqu’à minuit dans les combles, absorbé par un manuscrit dont les pages reposent sur un pupitre, à côté de son ordinateur. « Au bout d’un moment, je vis complètement dans le livre », reconnaît le traducteur de 57 ans, barbe rêche et regard pétillant. Depuis son antre, ce grand bavard déjoue les pièges de l’islandais, une langue ardue qui n’a presque pas changé depuis le XIIIe siècle. Son travail achevé, il relit son texte à voix haute, pour vérifier qu’il sonne juste. Et verse une larme quand l’émotion affleure.
Éric Boury traduit la crème de la littérature islandaise. Il appartient à une espèce rare en France, ils ne sont que trois à exercer ce métier à temps plein. On lui doit la traduction d’environ 80 livres, dont ceux de Jón Kalman Stefánsson (Mon Sous-Marin jaune, Christian Bourgois, 2024), régulièrement pressenti pour le Nobel de littérature, d’Audur Ava Olafsdottir (Miss Islande, Zulma, prix Médicis étranger, 2019), et surtout d’Arnaldur Indridason, le pape du polar islandais, lu jusqu’en Chine.
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