Avec l’adoption par les députés, à 261 voix (du bloc central au Rassemblement national) contre 107 voix, le Parlement a validé, mardi 17 juin, un projet de loi ouvrant la porte à l’envoi à l’étranger de millions de tonnes de dioxyde de carbone (CO2), destinées à être stockées dans des fonds marins, le gouvernement y voyant « un outil » pour atteindre la neutralité carbone en 2050.
Lors de l’examen du texte dans l’Hémicycle, c’est la gauche qui s’est principalement opposée au texte, dénonçant « une fuite en avant » pour ne pas réduire les émissions de CO2.
Au cœur des débats : le devenir du CO2 capté sur un site industriel puis comprimé et liquéfié, afin de l’enfouir plutôt que de le voir rejeté dans l’atmosphère. Or, contrairement à ses voisins, comme la Norvège – qui a annoncé un projet de captage et d’enfouissement sous-marin de 2,89 milliards d’euros mardi – ou le Danemark, la France ne dispose pas de site de stockage.
Le protocole de Londres, un texte international sur la prévention de la pollution, prévoit une interdiction de principe de toute exportation de déchets en vue de leur élimination en mer, et donc de leur enfouissement. Ce projet de loi, également adopté au Sénat, entend ainsi le modifier et permettre cette exportation.
Entre 8 % et 13 % de l’effort de réduction des émissions d’ici à 2050, selon Marc Ferracci
Pour le ministre chargé de l’industrie et de l’énergie, Marc Ferracci, il s’agit de « donner à [leur] industrie lourde, la possibilité de produire en France, sans relâcher dans l’atmosphère le carbone qu’elle produit inévitablement ». Car, selon lui, certains secteurs industriels, comme la sidérurgie, la production de ciment ou de chaux, « émettront toujours du CO2, même sans énergie fossile ». Un CO2 « fatal », mais « que l’on peut capturer », a plaidé le ministre.
« La capture du carbone ne se substituera pas à l’effort de décarbonation », a-t-il tenté de rassurer. Elle est, « à l’inverse, un des outils indispensables pour atteindre [leurs] objectifs » de neutralité carbone, selon lui. Elle devrait représenter entre 8 % et 13 % de l’effort de réduction des émissions d’ici à 2050, en France comme en Europe, a-t-il cité.
Mais pour les écologistes et les « insoumis », il s’agit d’une « nouvelle fuite en avant technologique » pour « éviter de s’attaquer à la source de la catastrophe climatique », selon les mots de la députée Nathalie Oziol (La France insoumise). Pour le député Edouard Bénard (Parti communiste), « cacher la poussière sous le tapis ou le carbone sous les océans n’est pas à la hauteur des enjeux ».
Le rapporteur du texte, le député macroniste et ancien ministre chargé de la mer, Hervé Berville, a rappelé que cette solution est soutenue par le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat.