La Martinique retient son souffle. Alors même que le ministre chargé des outre-mer, François-Noël Buffet, effectue un déplacement très attendu dans cette île des Antilles, en proie à des tensions dues à la vie chère depuis deux mois, des émeutiers ont érigé des barricades enflammées et incendié de majestueux lataniers dans plusieurs secteurs de Fort-de-France, mardi 12 novembre, à la tombée de la nuit. Largement diffusées sur les réseaux sociaux, ces images rappellent les violences urbaines qui s’étaient déclenchées, en septembre et octobre, et de nombreux Martiniquais craignent un basculement vers une nouvelle période d’émeutes, après deux semaines d’accalmie.
Cette nouvelle poussée de fièvre est indirectement liée à l’arrivée, lundi, de M. Buffet, pour une visite de quatre jours, dont l’un des principaux objectifs était de préciser la mise en œuvre d’un « protocole d’objectifs et de moyens » pour lutter contre la vie chère, signé, le 16 octobre, par le préfet et par une trentaine d’élus et d’acteurs du monde économique, dont les patrons des groupes de distribution locaux.
Ce plan en 28 points avait néanmoins été rejeté par l’association à l’origine de la mobilisation contre la cherté de la vie, le Rassemblement pour la protection des peuples et des ressources afro-caribéennes (RPPRAC), qui juge cet accord trop peu ambitieux, alors que les produits alimentaires sont en moyenne 40 % plus chers à la Martinique qu’en France hexagonale, selon l’Insee. Lundi soir, les leaders de ce collectif ont fait irruption dans le périmètre de la résidence privée du préfet et exigé de rencontrer le ministre. Après un face-à-face tendu devant la porte d’entrée, le représentant de l’Etat a refusé d’accéder à la demande des militants.
Aménagements fiscaux
Cet épisode a motivé l’arrestation, le lendemain soir, du président du RPPRAC, Rodrigue Petitot. « Il a été interpellé et placé en garde à vue pour violation de domicile et actes d’intimidation », dit au Monde Clarisse Taron, la procureure de la République de Fort-de-France. L’interpellation, non loin de son domicile, à Fort-de-France, de ce charismatique quadragénaire a été filmée par de nombreux témoins. Ces images ont suffi à mettre une nouvelle fois le feu aux poudres dans le quartier populaire de Sainte-Thérèse, épicentre des émeutes précédentes, mais aussi dans le centre-ville, aux abords du commissariat de police.
L’ambiance était nettement plus cordiale, mardi matin, à la préfecture de la Martinique. Le ministre s’est longuement entretenu, avec le préfet et la trentaine de signataires du protocole du 16 octobre, sur la mise en œuvre de ce plan de lutte contre la vie chère. A la sortie de la réunion, la satisfaction se lisait sur les visages. « L’objectif, c’est, au 1er janvier prochain, – 20 % sur 6 000 produits », a réaffirmé M. Buffet, lors d’une conférence de presse, à l’issue de cette rencontre. Sur ces articles de « nature diverse », les engagements des parties prenantes permettront de « réduire quasiment de 50 % l’écart [de prix] entre l’Hexagone et le territoire martiniquais », s’est félicité le ministre. « On le verra sur les étiquettes. »
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