Le président de transition syrien, Ahmed Al-Charaa, disant vouloir éviter une « guerre ouverte » avec Israël, a retiré, jeudi 17 juillet, ses troupes de la ville à majorité druze de Souweïda.
Le retrait des forces gouvernementales a eu lieu après un accord de cessez-le-feu proclamé mercredi. Ce dernier a été « obtenu par la force. Pas par des demandes, pas par des supplications – par la force », a commenté jeudi le premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou dans une vidéo diffusée par son bureau.
Assurant vouloir défendre les Druzes, Israël a frappé Damas, la capitale syrienne, mercredi, ainsi que, pour la troisième journée d’affilée, Souweïda. L’Etat hébreu affirme qu’il ne permettra pas une présence militaire dans le sud de la Syrie, près de sa frontière, alors qu’il considère avec méfiance le pouvoir islamiste syrien.
Jeudi soir, l’agence officielle syrienne SANA a fait état d’un raid israélien près de Soueida. Selon le média officiel, « des avions de l’occupation israélienne ont mené un raid » dans les environs de la ville, première frappe israélienne depuis le retrait des forces gouvernementales syriennes.
« Des corps jonchent les rues »
Dans la nuit de mercredi à jeudi, Ahmed Al-Charaa a annoncé le transfert « à des factions locales et cheikhs » druzes de la responsabilité du maintien de la sécurité à Souweïda, en proie à des affrontements communautaires depuis dimanche. Dans une allocution télévisée, le chef de l’Etat a justifié sa décision par « la nécessité d’éviter de sombrer dans une nouvelle guerre de grande ampleur ».
Selon l’Agence France-Presse (AFP), l’ordre de se retirer a été reçu peu avant minuit, et les forces gouvernementales ont achevé leur retrait de la ville à l’aube. « La ville de Souweïda semble vide de toute présence des forces gouvernementales », a attesté auprès de l’AFP le rédacteur en chef du site local Suwayda 24, Rayan Maarouf, ajoutant que la situation était « catastrophique, et des corps jonchent les rues ».
Jeudi matin, un photographe de l’AFP présent sur place a compté 15 corps gisant dans le centre de Souweïda. Les forces gouvernementales ont été accusées par des ONG, des témoins et des groupes druzes d’exactions lors des violences qui ont fait au moins 594 morts en quatre jours, selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH). D’après l’ONG, 300 druzes de Souweïda figurent parmi les morts, dont 154 civils, parmi lesquels 83 « exécutés sommairement par des membres [des forces relevant] des ministères de la défense et de l’intérieur ».
Les combats ont également coûté la vie à 257 membres des forces gouvernementales et à 18 combattants bédouins sunnites, en plus de trois membres de tribus « exécutés sommairement par des combattants druzes », selon l’OSDH. Par ailleurs, 15 membres des forces gouvernementales ont été tués par des frappes israéliennes, alors qu’un journaliste a été tué en couvrant les violences, d’après l’ONG.
Al-Charaa accuse Israël d’avoir contribué à « l’escalade »
Des affrontements entre des tribus bédouines sunnites et des combattants druzes, une minorité issue de la branche ismaélienne du courant chiite, ont éclaté, dimanche, dans la province de Souweïda à la suite de l’enlèvement d’un marchand de légumes druze. Le gouvernement syrien a déployé mardi des forces dans la région dans l’objectif affiché de rétablir l’ordre. Mais l’OSDH, des témoins et des groupes druzes l’ont accusé de combattre les factions druzes.
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Dans son discours de jeudi, Ahmed Al-Charaa a accusé Israël d’avoir contribué à « l’escalade » et salué au contraire « l’intervention efficace de la médiation américaine, arabe et turque, qui a sauvé la région d’un sort inconnu ». Le président syrien n’a pas précisé quels pays arabes étaient intervenus dans la médiation.
La Maison Blanche a mis en avant jeudi le rôle des Etats-Unis dans la « désescalade » qu’elle dit observer en Syrie, et qui « semble continuer ». La porte-parole du département d’Etat américain, Tammy Bruce, avait appelé mercredi le gouvernement syrien à quitter la zone de conflit dans le sud du pays afin d’apaiser les tensions avec Israël. Mme Bruce a assuré par ailleurs que les Etats-Unis n’avaient « pas soutenu » les frappes israéliennes.
De son côté, le président turc, Recep Tayyip Erdogan, a accusé Israël « d’utiliser les druzes comme prétexte à son action illégale » en Syrie, estimant que « le principal problème de la région est l’agression israélienne ».