Emilia Pérez, du réalisateur français Jacques Audiard, a remporté, samedi 8 février, le prix du meilleur film européen aux Goya, équivalent espagnol des Oscars, en pleine polémique sur d’anciens tweets jugés offensants de son actrice principale, Karla Sofia Gascon. Cette odyssée musicale en espagnol sur la transition de genre d’un narcotrafiquant mexicain concourrait dans cette catégorie contre le film britannique La Zone d’intérêt, le letton Flow, l’italien La Chimère et un autre long métrage français, Le Comte de Monte-Cristo.
La victoire d’Emilia Perez a été annoncée lors d’une cérémonie organisée samedi soir à Grenade, mais le vote des membres du jury avait été clos le 24 janvier, soit quelques jours avant le début de la polémique sur les anciens messages de l’actrice trans espagnole.
Dans ces posts, exhumés fin janvier par une journaliste américaine, Karla Sofia Gascon qualifiait, entre autres, l’islam de « foyer d’infection pour l’humanité » et raillait le mouvement antiraciste après la mort de George Floyd, un Noir-Américain tué par la police en 2020. Rattrapée par ces messages, l’actrice de 52 ans a présenté ses excuses « en tant que membre d’une communauté marginalisée ». Elle s’est ensuite défendue d’être « raciste » dans une interview à la version espagnole de la chaîne américaine CNN.
L’actrice ne s’est pas rendue à la cérémonie
La presse espagnole avait un temps spéculé sur la possibilité que Karla Sofia Gascon, qui a dû annuler sa présence à plusieurs événements aux Etats-Unis, assiste à la cérémonie des Goya. Mais l’actrice, qui réside près de Madrid, ne s’est finalement pas rendue à Grenade. Le prix a été reçu par un représentant du distributeur du film en Espagne.
La polémique générée par les tweets de Karla Sofia Gascon est survenue en pleine campagne pour les Oscars, où le film de Jacques Audiard concourt pour treize statuettes, dont celles du meilleur film international et de meilleure interprétation féminine pour l’actrice trans. Elle a conduit Netflix, qui gère la promotion du film pour les Oscars, à retirer l’actrice de toutes ses campagnes. Jacques Audiard a quant à lui désavoué la comédienne, qui a annoncé vendredi garder désormais le « silence », par respect pour Emilia Pérez et « l’équipe incroyable qui le mérite ».
Le long métrage, qui volait de succès en succès depuis sa présentation au printemps au Festival de Cannes, a fait l’objet ces dernières semaines d’une autre controverse, au Mexique cette fois, où il s’est vu reprocher de s’approprier avec légèreté les tragédies liées au narcobanditisme.
Dans un entretien accordé au média spécialisé Deadline, Jacques Audiard a défendu son travail et rappelé avoir voulu « faire un opéra », non « un documentaire ». « Cela demande une forte stylisation », a-t-il souligné, en rejetant les critiques sur le manque de « réalisme » du film.