En Guinée, mercredi 28 mai, un tribunal de Conakry a condamné en appel un opposant à deux ans de prison pour « offense et diffamation » à l’encontre du chef de la junte, a déclaré sa défense à l’Agence France-Presse (AFP), une décision critiquée par l’opposition et des défenseurs des droits humains.
Aliou Bah, président du Mouvement démocratique libéral, est en détention depuis décembre 2024. Il a été condamné en première instance en janvier à la même peine de deux ans de prison ferme pour « offense et diffamation » à l’encontre du général Mamadi Doumbouya. Le parquet avait requis, lors du procès en appel, le 22 avril, une peine de cinq ans.
Le procureur général de la Cour d’appel, Fallou Doumbouya, avait estimé que la peine prononcée en première instance était « excessivement dérisoire ». A l’ouverture de son procès en appel, fin mars, M. Bah a plaidé non coupable : « Je ne reconnais pas les faits qui me sont reprochés », a-t-il dit devant la cour.
« Une décision inique et injuste »
Selon sa défense, il est reproché à M. Bah d’avoir, lors de meetings, « appelé les chefs religieux à sortir de leur silence » sur la situation en Guinée, et qualifié d’« incompétent » le Comité national du rassemblement et du développement, l’organe dirigeant de la junte.
« Le jugement en première instance a été confirmé » par la Cour d’appel, a déclaré à l’AFP Me Galissa Hady Diallo, membre du collectif d’avocat de la défense d’Aliou Bah. Il a précisé qu’une concertation entre les avocats de la défense et leur client déciderait d’un recours en cassation ou non devant la Cour suprême. Les journalistes de l’AFP ont été empêchés par les gendarmes d’accéder à la salle d’audience.
Un responsable du parti d’Aliou Bah, Cheikh Sakho, a dénoncé « une décision inique et injuste » prise par « une justice instrumentalisée ». Un autre opposant, Ibrahima Diallo, en exil en Europe depuis un an, a affirmé à l’AFP que cette condamnation « donne raison aux acteurs politiques et de la société civile qui s’exilent pour éviter d’être victimes de la justice de la junte ».
Cette décision « est un triomphe de l’arbitraire contre la liberté », estime, pour sa part, Alseny Sall, responsable de l’Organisation guinéenne pour la défense des droits de l’homme. De son côté, Fabien Offner, d’Amnesty international, a fustigé « un régime visiblement prêt à tout pour étouffer les critiques et notamment celles qui le rappellent à ses engagements ».
Restriction des libertés
Cette condamnation d’Aliou Bah intervient dans un climat tendu, marqué par la restriction sévère des libertés dans ce pays d’Afrique de l’Ouest. Plusieurs responsables de l’opposition au régime militaire sont en exil. Deux d’entre eux qui réclament un retour des civils au pouvoir, Oumar Sylla, alias Foniké Menguè, et Mamadou Billo Bah, sont portés disparus depuis juillet 2024.
Le général Doumbouya a pris le pouvoir en septembre 2021 après avoir renversé le président civil, Alpha Condé, qui était au pouvoir depuis plus de dix ans.
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Des manifestations réclamant le départ des militaires sont régulièrement interdites et plusieurs médias ont été fermés dans le pays.
Sous pression internationale, la junte s’était initialement engagée à organiser un référendum constitutionnel et à transférer le pouvoir à des civils élus avant fin 2024, mais aucune de ces promesses n’a été tenue. Elle a annoncé la tenue d’un référendum constitutionnel le 21 septembre.