Et le gouvernement Barnier est tombé. Avec 331 voix, le premier ministre issu des Républicains (LR) a été censuré par les députés, la gauche et l’extrême droite ayant mêlé leurs voix pour le renverser. L’ancien commissaire européen quitte donc Matignon, moins de trois mois après y être entré, devenant le deuxième chef de gouvernement de la Ve République à ne pas pouvoir échapper à la censure, après Georges Pompidou en 1962. Une sanction historique, qui vient confirmer, s’il en était besoin, l’échec cuisant de l’opération dissolution, déclenchée par Emmanuel Macron le 9 juin.
Car afin de justifier sa décision, le président avait expliqué qu’il s’agissait d’éviter la censure du gouvernement Attal sur le budget, attendue pour l’automne. Avant toute chose ne pas subir, expliquaient alors ses exégètes élyséens. Six mois plus tard, c’est exactement le scénario redouté qui se produit : le gouvernement se voit censuré sur le budget de la « Sécu », la boucle est bouclée.
Mais quels dommages au passage : une période de stress et de tension pour le pays, alors que le Rassemblement national (RN), grand vainqueur des élections européennes, n’avait jamais semblé aussi proche du pouvoir ; un scrutin législatif organisé à la va-vite sans que le débat démocratique puisse s’élancer ; des semaines de vacance du pouvoir, avec un gouvernement cantonné aux affaires courantes, alors que les déficits continuaient de se creuser ; un RN devenu maître du jeu, tant pour gouverner (Barnier a en partie cédé à ses revendications) que pour censurer (la gauche a accepté d’être coresponsable de la censure avec lui) ; un affaissement de l’image de la politique… Et, finalement, tant de temps perdu, au détriment des Français, pour revenir à la case départ… Tout ça pour ça !
Responsabilités des partis
En boomerang, la pression est revenue sur Emmanuel Macron qui, avec cette décision « insensée, en ceci qu’elle n’a pas de sens », comme la décrivait l’ex-député (Renaissance) de Paris Gilles Le Gendre, s’est lui-même mis dans une seringue. Depuis l’Arabie saoudite, le chef de l’Etat a assuré qu’il n’avait nul regret, assumant d’avoir voulu « redonner la parole au peuple » et renvoyant la « responsabilité » de la situation au « peuple français », qui a voté les 30 juin et 7 juillet. Le président de la République a toujours refusé de prendre sa part dans l’échec de l’opération qu’il a entreprise. « Au soir du second tour, ce sera la faute de personne », clamait-il entre les deux tours des législatives, alors que la possibilité d’une victoire du RN le 7 juillet prenait corps, avant d’être évitée grâce au front républicain.
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