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Dans une démarche inédite, le site d’investigation Mediapart a annoncé dimanche 28 avril qu’il refusait de toucher la somme « substantielle » due au titre des droits voisins par Google pour l’utilisation de ses articles, faute de « transparence » sur le contrat avec le géant américain.

« En mars 2024, Mediapart aurait dû toucher une substantielle somme en contrepartie de l’usage, par Google, de nos articles, et donc de nos informations exclusives, sur son moteur de recherche. Mais en l’absence de transparence, nous avons stoppé l’arrivée du virement sur nos comptes », explique Carine Fouteau, présidente et directrice de la publication, qui a succédé en mars à Edwy Plenel.

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Cette somme, dont le montant n’a pas été révélé, correspond aux droits voisins du droit d’auteur, institués pour les plates-formes numériques en 2019 par une directive européenne. Ils permettent aux journaux, magazines ou agences de presse d’être rémunérés lorsque leurs contenus sont réutilisés sur Internet par les géants comme Google.

« Mediapart considère que le principe de cette compensation financière (…) est juste », mais « une condition incontournable pour notre journal n’a pu être arrachée : la transparence sur le contrat signé et ses modalités d’application », relève Carine Fouteau dans un article publié sur le site.

En mars, l’Autorité française de la concurrence a sanctionné Google d’une amende de 250 millions d’euros pour le non-respect de certains de ses engagements pris en 2022 concernant les droits voisins. Elle estime notamment que l’entreprise n’a pas négocié « de bonne foi sur la base de critères transparents » avec des éditeurs de presse pour évaluer leur rémunération au titre de ces droits.

L’annonce de Mediapart intervient à la suite de l’accord conclu en octobre par Google avec l’organisme de gestion collective DVP, qui représente notamment Mediapart, et dont le rôle est de collecter les droits puis de les répartir à ses membres, sur le modèle de la Sacem pour la musique.

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La rétribution due à Mediapart, pour environ trois années d’exercice, « reste en réserve dans l’organisme de gestion collective, en attendant que le voile sur les chiffres soit levé », précise Carine Fouteau, qui considère la bataille « nécessaire pour l’ensemble de notre écosystème » de la presse.

Alors que des négociations sont en cours avec Facebook, Microsoft, X et LinkedIn, et que l’intelligence artificielle pose à nouveau la question de l’utilisation des articles de presse, « nous espérons une mobilisation des autres acteurs du secteur », a ajouté la présidente de Mediapart dans un entretien avec l’Agence France-Presse (AFP). Elle attend aussi des élus qu’ils « complètent la loi de 2019 (qui a transposé la directive européenne) pour inscrire ce refus du secret ».

« L’opacité est profitable à Google »

« L’opacité est profitable à Google. Il n’a ainsi pas à reconnaître publiquement la valeur de l’information », selon la journaliste. En bonne santé financière, Mediapart dépend quasi uniquement des abonnements (220 000 en 2023) et son capital est sanctuarisé depuis 2019, ce que ses responsables font valoir comme une garantie d’« indépendance ».

L’AFP a signé de son côté avec Google fin 2021 un accord sur les droits voisins qui rémunère l’agence pendant cinq ans pour ses contenus présentés par le géant américain, ainsi que deux contrats commerciaux, également conclus pour cinq ans.

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Le Monde avec AFP

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