Nicole Prieur est philosophe et thérapeute familiale, spécialiste, entre autres sujets, de la question de l’argent dans les couples et les familles. Elle y consacre un chapitre dans son dernier ouvrage, Disputez-vous bien ! (Robert Laffont, 208 pages, 19 euros), écrit avec Bernard Prieur.
Quelle est la fonction de l’argent de poche ?
Donner de l’argent de poche permet de parler d’argent à ses enfants, de sortir du tabou. Le montant donné n’a pas d’importance : ce qui compte, c’est le principe, car cela marque le fait que l’adolescent grandit, qu’il prend son indépendance.
Cela permet aux parents de transmettre leurs valeurs en montrant à l’adolescent qu’il peut le dépenser, l’épargner et même s’en servir pour être généreux. Sur ce point, les garçons et les filles sont très différents : la société formate les filles pour être dans le « care », le don, l’attention à l’autre, elles sont donc plus généreuses avec leur argent.
A l’inverse, l’argent de poche est un attribut sociétal pour les garçons, qui le dépensent, le montrent. Autre différence, on constate que les garçons réclament de l’argent de poche, voire une rallonge lorsqu’ils ont tout dépensé, alors que les filles le font moins.
Certains parents utilisent par ailleurs l’argent comme une carotte, par exemple pour une bonne note. Cela le vide de son sens, car l’adolescent ne doit pas réussir son contrôle pour faire plaisir à ses parents, mais pour lui-même. La situation est différente lorsque l’on fait un cadeau à son enfant à l’occasion d’une belle mention au bac, par exemple : dans ce cas il n’y a pas de chantage, il s’agit juste de lui faire plaisir.
Quel parent parle davantage d’argent aux adolescents ?
Les ados peuvent parler argent avec leurs deux parents, mais sur des sujets différents. Les femmes sont le plus souvent dans la gestion du quotidien, tandis que les hommes s’intéressent plus aux questions d’investissement et aux achats importants, comme une voiture. En revanche, aucun des deux parents ne dit généralement combien il gagne à ses enfants, car, en France, le salaire relève de l’intime. On ne l’évoque ni avec ses enfants, ni avec ses amis, ni avec ses frères et sœurs. Mais cela n’empêche pas de se plaindre ouvertement de ne pas avoir assez d’argent, c’est assez paradoxal !
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