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Histoires Web dimanche, avril 28
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L’avocat général Philippe Courroye a demandé aux cinq juges de la cour criminelle de Paris de condamner Salim Berrada à dix-neuf ans de réclusion, jeudi 28 mars, mais c’est bien à l’accusé de 38 ans, davantage qu’aux magistrats, qu’il s’est adressé tout au long de son réquisitoire. Comme si, plus que d’emporter la conviction de la cour, qui semble acquise depuis le premier jour du procès, il avait voulu tenter une dernière fois de faire basculer celui qui, neuf ans après la première plainte contre lui, reste « bunkérisé dans le béton de ses dénégations ».

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Ce furent donc près de trois heures d’un monologue les yeux dans les yeux avec un homme « dangereux », accusé de treize viols et quatre agressions sexuelles sur de jeunes femmes alors âgées de 18 à 28 ans tombées dans son « piège de la rue Pixérécourt », dans le 20e arrondissement de Paris, où elles s’étaient rendues en imaginant prendre part à un shooting chez ce photographe de mode à la notoriété naissante.

Salim Berrada réfute l’ensemble des accusations. « Aucune de ces jeunes filles n’a été violée ou agressée sexuellement, toutes étaient consentantes, circulez, y’a rien à voir » : ainsi Philippe Courroye a-t-il résumé la position d’un accusé « seul contre toutes », animé d’un « sentiment total d’impunité » semblable à celui de « l’automobiliste qui remonte l’autoroute à contresens en klaxonnant ».

« Elle a dit son refus, vous n’avez pas entendu ? »

Les unes après les autres, l’avocat général a nommé les dix-sept plaignantes, reprenant des extraits de leurs dépositions qu’il a ponctués de questions à l’accusé. Alice (les prénoms ont été modifiés), qui a raconté à la barre avoir « pleuré du début à la fin » lors de leur rapport sexuel : « Que faut-il de plus, monsieur, pour vous faire comprendre qu’elle n’est pas consentante ? » Solène, qui lui a dit « il ne faut pas, deux fois » avant le viol qu’elle dénonce : « Elle a dit son refus, vous n’avez pas entendu ? » Fanny, qui a mis un coup de talon dans le bassin de l’accusé pour se dégager de son étreinte : « Si ça n’est pas un refus exprimé physiquement, qu’est-ce que c’est ? » Comme ça, dix-sept fois.

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Anticipant les arguments des avocats de la défense, qui doivent plaider vendredi matin, Philippe Courroye a insisté : ce dossier, ce n’est pas seulement parole contre parole. Il y a les témoins – l’amie, le copain, la mère – venus raconter l’état de choc dans lequel ils avaient trouvé les plaignantes après les faits. Il y a les traumatismes racontés par les intéressées ou observés par des médecins – les ruptures sentimentales ou professionnelles, les dépressions, les addictions, les cauchemars, etc. Fanny, avec ses ecchymoses constatées le lendemain des faits, qui a perdu ses cheveux et n’a pas eu de relations sexuelles pendant deux ans ensuite. « C’est du bidon, ça, monsieur ? C’est compatible avec une relation sexuelle parfaitement consentie ? »

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