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C’est une information connue des invités du défilé Dior comme des employés de la marque : cette collection croisière 2026, présentée à Rome, le 27 mai, est la dernière de Maria Grazia Chiuri pour la marque. Après neuf ans de bons et loyaux services, la designer des collections femmes devrait bientôt laisser sa place à Jonathan Anderson, qui a déjà pris le poste de designer homme chez Dior en avril. Mais, en attendant l’annonce, le sujet n’est pas officiellement évoqué. Et, à ce défilé, toute l’attention est centrée sur la créatrice, qui s’offre un dernier événement spectaculaire dans sa ville natale, où elle réside quand son travail n’exige pas sa présence à Paris.

Chez Dior, les collections croisière sont toujours mises en scène dans un ailleurs dépaysant. La plupart du temps, les destinations permettent de faire des clins d’œil au passé de la maison (avec un château en Ecosse ou l’Acropole, à Athènes) ou de s’associer avec des artisans locaux (au Mexique, en Espagne, au Maroc, etc.), dont les savoir-faire étrangers apportent une touche d’exotisme aux collections. Même si Christian Dior appréciait l’Italie, les liens historiques entre la griffe et la capitale sont ténus ; Rome semble plutôt avoir été choisie pour donner à Maria Grazia Chiuri l’occasion de parler d’elle et de montrer ce qu’elle aime.

Pour ce dernier défilé, les 750 invités ont chacun reçu un petit livret avec les meilleures adresses romaines de la designer, allant du restaurant à la galerie d’art en passant par la librairie. La matinée précédant le show, un circuit a été organisé afin de faire découvrir plusieurs de ces lieux, tous liés à la culture italienne.

Dior, collection croisière 2026. 

Le plus important d’entre eux, pour Maria Grazia Chiuri, est le Teatro della Cometa (« Théâtre de la Comète »), qu’elle a racheté en 2020. La salle, inaugurée en 1958 par la galeriste et mécène Anna Laetitia Pecci Blunt (aussi appelée « Mimi »), dont le goût pour les arts a toujours séduit la styliste, a connu son heure de gloire dans les années 1960 quand elle accueillait Samuel Beckett ou Igor Stravinsky. Les décennies suivantes furent moins fastes, mais il est difficile de se le figurer quand on découvre le théâtre flambant neuf après plusieurs années de travaux.

Ce 27 mai au matin, Maria Grazia Chiuri y est présente avec sa fille Rachele Regini (conseillère culturelle chez Dior) et reçoit, l’air enjoué, ses nombreux invités. Parmi eux, la PDG de Dior, Delphine Arnault, mais aussi des artistes locaux ou internationaux (l’actrice britannique Rosamund Pike, égérie de la marque, y fait une entrée remarquée dans une robe couleur or).

Broderies saillantes

Dans la foulée, les invités ont rendu visite à Pietro Ruffo. La collaboration entre cet artiste romain et Maria Grazia Chiuri remonte à l’époque où la designer travaillait chez Valentino, et s’est poursuivie chez Dior. Dans son atelier, situé dans une ancienne manufacture de pâtes, le charismatique quadragénaire a montré au travers de ses œuvres son goût pour le papier et les cartes géographiques, mais surtout ses dessins qui sont devenus des carrés de soie Dior. Le dernier en date, pensé pour cette croisière, représente les monuments les plus emblématiques de Rome. « Maria Grazia est comme une cheffe d’orchestre qui tire le meilleur parti de ses musiciens et sans jamais se mettre en avant », s’enthousiasme l’artiste.

Le soir venu, les invités ont convergé vers la villa Albani Torlonia, un magnifique édifice néoclassique du XVIIIe siècle appartenant à la famille Torlonia, qui n’accorde que très rarement des droits de visite – la présence du défilé Dior témoigne à la fois de la puissance de la marque de LVMH et de l’entregent de Maria Grazia Chiuri à Rome. Dans les jardins à l’italienne de la villa, avant le début du show, des danseurs surgissent de bosquets ou miment en groupe des tableaux vivants. Des acteurs vêtus de costumes d’époque fabriqués par Tirelli (dont les ateliers faisaient aussi partie du tour matinal) se mêlent aux invités. « Quand on parle de Rome, on pense toujours à l’art antique, je voulais aborder la ville autrement, montrer ses liens avec le cinéma, le théâtre, la danse », explique Maria Grazia Chiuri.

La collection est inspirée par un « bal blanc », donné à Paris, en 1930, par « Mimi », où les invités étaient arrivés dans de somptueuses robes à crinoline, ou déguisés en statue. Maria Grazia Chiuri se sert de la couleur blanche pour fédérer des silhouettes qui piochent dans tous les vestiaires de toutes les époques : des gilets plutôt masculins, parfois à queue-de-pie, accompagnent de longues jupes en fine dentelle ou sculptées de broderies saillantes comme des bas-reliefs. Des vestes militaires rencontrent de longues robes à traîne, chargées de volants. Quelques silhouettes en velours noir ou rouge rompent l’uniformité chromatique. C’est un vestiaire du soir, très élégant, qui frappe par sa cohérence et par la qualité de la réalisation (parmi les 80 looks, 31 sont de la haute couture).

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L’absence de logo, la quantité restreinte d’accessoires et le grand nombre de tenues transparentes laissent supposer que Maria Grazia Chiuri n’avait pas envie, cette fois-ci, d’obéir à des logiques commerciales. Mais, plutôt de se concentrer sur ce qui compte pour elle, c’est-à-dire le travail de la matière, enrichi par des références historiques. L’ensemble est beau, mais aussi un peu redondant : certaines silhouettes se répètent et, plus généralement, il ressemble à ce que Maria Grazia Chiuri a l’habitude de proposer chez Dior depuis 2016. Tout en étant réussi, ce défilé souligne la nécessité pour la marque d’aller de l’avant, et de définir un nouveau langage esthétique qui lui permette de rester compétitive dans une industrie du luxe en crise.

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