Ces derniers mois, les Etats-Unis ont ajouté plusieurs juges et le procureur de la Cour pénale internationale à la liste des « personnes et ressortissants spécialement désignés » établie par l’Office de contrôle des actifs étrangers (OFAC) chargé de l’application des sanctions internationales américaines dans le domaine financier. Ils ont été rejoints, le 9 juillet, par la rapporteuse spéciale des Nations unies sur les territoires palestiniens occupés, Francesca Albanese.
Les personnes listées voient leurs avoirs aux Etats-Unis gelés, et il est interdit aux ressortissants et sociétés américaines de commercer avec elles. Il ne s’agit pourtant ici ni de criminels ni de fugitifs, mais de professionnels du droit international respectés. Sanctionnés non pour des actes répréhensibles, mais pour avoir exercé leur fonction – d’une manière qui à l’évidence déplaît à Washington.
Ce développement n’est pas seulement un affront diplomatique. C’est un signe alarmant. Un nombre restreint mais croissant de citoyens européens – innocents au regard de toutes les normes juridiques de l’Union européenne (UE) – figure également sur la liste OFAC. Ces derniers ne font l’objet d’aucune enquête dans leur pays. Aucun tribunal ne les a condamnés. Et pourtant, leurs familles et eux sont traités comme des parias. Non seulement aux Etats-Unis, mais – plus grave encore – dans leur propre pays, au sein même de l’UE.
Ces individus sont les morts-vivants de l’Europe : juridiquement vivants, mais effacés économiquement et socialement. Victimes d’une peine de « mort civile ». Leur inscription sur la liste OFAC, souvent pour des raisons opaques ou arbitraires, déclenche une cascade de conséquences bien au-delà des frontières américaines. Car c’est en Europe que les banques ferment leurs comptes ; que les entreprises informatiques coupent l’accès aux e-mails, aux logiciels et aux services cloud ; que les sociétés de livraison refusent de déposer des colis à leur porte. Des familles sont ruinées. Des carrières anéanties.
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