Après huit mois de détention provisoire, l’heure est à la bataille devant les tribunaux. Lundi 5 mai, le procès du producteur de musique Sean Combs, dit Diddy, P. Diddy ou encore Puff Daddy, s’est ouvert à Manhattan (New York). Au terme d’une première phase de sélection des jurés, les avocats prononceront leurs déclarations liminaires à partir du lundi 12 mai.
Ce procès, qui devrait durer au moins un mois, doit autant son importance à la notoriété du prévenu qu’à la gravité des faits qui lui sont reprochés. Le rappeur de 55 ans est poursuivi par la justice fédérale de New York pour des faits de trafic sexuel.
Le musicien, producteur, entrepreneur et philanthrope multimillionnaire a été écroué et placé sous surveillance anti-suicide depuis son arrestation, en septembre 2024. Ses nombreuses demandes de libération sous caution ont toutes été refusées.
Outre cette plainte au pénal, il fait également l’objet de plus d’une centaine de plaintes au civil pour violence sexuelle, dont certaines incriminent par ailleurs d’autres membres de son entourage, notamment deux de ses fils. Selon un décompte du Washington Post, au 1er mai, 78 avaient donné lieu à une action en justice, la plupart encore en cours, malgré les requêtes en rejet déposées par le rappeur.
Qui est Diddy ?
Sean Combs, de son vrai nom, est un influent rappeur et producteur de hip-hop new-yorkais, connu successivement sous les pseudonymes Puff Daddy, Puffy, P. Diddy ou plus simplement Diddy. Né en 1969, il se fraie un chemin dans l’industrie musicale en cofondant, en 1993, le label Bad Boy Records, qui lance notamment The Notorious B.I.G., future icône du rap new-yorkais.
Il se lance à son tour dans la chanson en 1997, sous le nom de Puff Daddy, et connaît le succès avec I’ll Be Missing You, titre dédié à The Notorious B.I.G., assassiné la même année. Le rappeur change de surnom à plusieurs reprises, jusqu’à adopter celui de Diddy, en 2005. Il remporte au cours de sa carrière trois Grammy Awards et une étoile à son nom gravée, depuis 2008, sur Hollywood Boulevard, à Los Angeles.
Le musicien et producteur est aussi un homme d’affaires à succès, à l’initiative d’une marque de vêtements (Sean John, lancée en 2004), d’une chaîne de télévision (Revolt TV, créée en 2013) ou encore d’un partenariat avec une marque de vodka produite en France. En 2024, le magazine Forbes estimait sa fortune à 400 millions de dollars (353 millions d’euros, au cours actuel).
Depuis ses débuts, Sean Combs a également été associé à diverses affaires de violence. Il a ainsi été impliqué, en 1999, dans une fusillade au sein d’une boîte de nuit new-yorkaise où il passait la soirée avec sa compagne de l’époque, l’actrice Jennifer Lopez. Il a été inculpé pour possession d’arme à feu et corruption, mais n’a pas été condamné.
De quoi est-il accusé ?
La star du rap organisait, depuis les années 1990, des orgies fastueuses dans ses résidences, les « soirées blanches », qui réunissaient de grands noms de l’industrie du divertissement. Celles-ci prenaient régulièrement la forme d’orgies sexuelles, sous drogues, de parfois plusieurs jours, en présence de prostitués hommes et femmes. Depuis 2024, plusieurs dizaines de participants, souvent des jeunes femmes, affirment y avoir été forcés à avoir des rapports sexuels non consentis.
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Diddy fait aujourd’hui face à cinq chefs d’accusation : un pour extorsion et association de malfaiteurs (racketeering conspiracy, en anglais), deux pour trafic sexuel, et deux autres pour transport d’êtres humains à des fins de prostitution. La principale accusation, celle pour extorsion, recouvre des allégations graves de kidnapping, consommation forcée de drogue et relations sexuelles imposées, sous la menace de violence ou d’armes à feu.
« Pendant des décennies, [il] a abusé, menacé et contraint des femmes à satisfaire ses désirs sexuels, protéger sa réputation et cacher ses actes », selon l’acte d’inculpation du parquet fédéral de Manhattan. Diddy a plaidé non coupable à deux reprises, en septembre 2024 puis en avril 2025, et continue de nier les faits. « Au tribunal, la vérité l’emportera : M. Combs n’a jamais agressé sexuellement ni exploité qui que ce soit – homme ou femme, adulte ou mineur », ont assuré à la BBC ses avocats, qui présentent leur client comme un honnête libertin.
Quatre témoignages de victimes ont été retenus par les procureurs fédéraux, notamment celui de son ancienne petite amie Cassie Ventura. Une vidéo de 2016 des coups portés par le rappeur contre cette dernière doit être diffusée au cours du procès, d’après la chaîne CNN. La justice a par ailleurs saisi à son domicile de grandes quantités de preuves filmées, de jouets sexuels et de drogues.
Plusieurs autres noms ont été évoqués dans des plaintes et dans la presse, accusés de complicité dans les agressions, soit en raison de leur simple participation aux soirées de Diddy (comme Leonardo DiCaprio ou le prince William), soit pour des soupçons d’agressions ou de complicité (comme Kristina Khorram, son ancienne assistante). Mais, à ce jour, aucun n’a été inquiété par la justice dans ce dossier, et Diddy est le seul prévenu du procès qui s’est ouvert le 5 mai.
Quelle peine encourt-il ?
M. Combs risque la réclusion à perpétuité s’il est jugé coupable d’extorsion et association de malfaiteurs. Il encourt également une peine plancher de quinze ans d’emprisonnement pour le chef d’accusation de trafic sexuel et de dix ans maximum pour le transport d’êtres humains à des fins de prostitution.
A titre de comparaison, le gourou américain Keith Raniere a été condamné, en décembre 2024, par un tribunal de New York à cent vingt ans de prison pour avoir établi un harem d’esclaves sexuelles, dont l’une était mineure (aux Etats-Unis, contrairement à la France, les peines peuvent se cumuler). Il avait été jugé coupable de sept chefs d’accusation, dont extorsion et association de malfaiteurs et trafic sexuel.