David Feldman, en Suisse, organise onze ventes aux enchères du 18 au 24 novembre, parmi lesquelles deux sessions consacrées à la France – décrite comme « l’offre la plus importante jamais présentée par la société » – et à ses ex-colonies : plus de 1 400 lots au catalogue dispersés le 19 novembre à 10 heures, puis le 20 novembre, à 10 heures.
Pour les « classiques », une paire tête-bêche du 20 centimes noir « Cérès » sur lettre de Toulouse pour Marseille, cachet à date de départ du 29 avril 1849 et arrivée le 30, est estimée 4 000 à 6 000 euros.
Trois feuilles d’essais de la « Cérès » de 1849 (valeur fictive « 00 »), datant de 1858, de 150 exemplaires chacune en vert, bleu et bistre (cette dernière présente une déchirure recollée), présentées à l’exposition de Londres de 1862, toutes avec signature Albert Barre (le graveur général des Monnaies, qui supervise l’impression des premiers timbres de France) en marge inférieure, sont estimées 7 500 à 14 000 euros.
Ces feuilles avaient été mises en vente chez Roumet, à Paris, en mars 2024, au prix de départ de 6 000 euros. On verra si David Feldman fait mieux.
A 120 000/140 000 euros, on trouve une paire neuve du 10 centimes bistre-jaune « Présidence » de 1852, « avec pleine gomme d’origine, très belles marges, infime pelurage sur timbre de droite, seule paire neuve connue à ce jour, ce qui en fait le timbre le plus rare de France à l’état neuf ».
Quelques curiosités pimentent la vente, comme ces années complètes non dentelées 1997 et 1998 constituées de timbres, de bandes-carnets, de blocs, estimées respectivement de 8 000 à 12 000 euros et 12 000 à 18 000 euros.
Un ensemble de dix épreuves d’artiste du timbre à l’effigie de Pierre de Coubertin (1956), toutes de couleurs différentes et toutes signées du graveur Raoul Serres est estimé 600 à 1 000 euros.
La vente disperse une forte rubrique de timbres de la Libération, parmi lesquels des timbres de propagande imprimés en 1945 aux Etats-Unis légendés « Futsches Reich » (littéralement « Reich foutu », au lieu de « Deutsch Reich »), représentant un profil de Hitler squelettique, imprimés dans le cadre de l’opération « Corn Flakes » : sur enveloppe, un bloc de huit (avec intervalle) oblitéré du 11 janvier 1945 ou ce même bloc de huit exemplaires, mais à l’état neuf (estimation 2 000/3 000 euros pour chacune des pièces).
Un bloc de quinze exemplaires du 50 centimes surchargé sur 90 centimes outremer au type « Paix », neuf, coin de feuille daté du 13 juillet 1939, avec variété d’impression de la surcharge doublée, propose une fourchette de prix de 15 000 à 25 000 euros.
Deux feuilles de cent de la « Marianne » de Decaris, avec variété d’impression, l’une rouge omis (donc sans sa valeur), l’autre le gris, coin daté du 27 mai 1964, pointe à 5 000-6 000 euros.
Pour 1 400-2 200 euros, deux classeurs rassemblent des classiques (1849-1900) en majorité oblitérés, composés de bonnes valeurs, mais aussi de nombreuses nuances, variétés et belles oblitérations dont certaines assez peu communes – dont oblitération du 3 janvier 1849 sur 20 centimes noir, corps expéditionnaires, « OR », bureaux étrangers –, plusieurs lettres intéressantes (piquages sur lettres, armées d’Orient et divers), « à trier et valoriser »…
Parmi de nombreuses collections démarrant par les premiers classiques de France, un ensemble quasi complet (1849-1944) en album, pour une cote supérieure à 55 000 euros, est proposé sur la base d’une estimation de 5 000 à 8 000 euros.
Comptez 1 500 à 2 500 euros pour un spectaculaire ensemble de plus de cinq mille timbres 40 centimes orange « Napoléon » lauré (1863), oblitérés, montés sur d’anciennes pages d’album, « quantité idéale pour recherche d’oblitérations, de variétés, planchage ».
Les gros prix reviennent aux « ballons montés » de la guerre franco-prussienne de 1870-1871, avec des destinations exotiques rarissimes. Ces dirigeables qui s’échappaient de Paris assiégée transportaient, entre autres, du courrier (lettres, journaux, objets de correspondance divers) que les philatélistes, dans leur jargon, désignent sous le terme de « ballons montés »
Un n° 10 de la Gazette des Absents transportée par Le Ville-d’Orléans à destination de Panama, repêchée après son accident, cachet de départ de Paris Place de la Bourse du 23 novembre 1870, mention manuscrite « vapeur anglais » et « via Southampton » avec cachet de passage par Londres du 2 décembre, griffe rouge « PP » (pour « port payé ») en remplacement du timbre (à 80 centimes) décollé par immersion, est estimé 70 000/100 000 euros.
Une lettre transportée par Les Etats-Unis, à destination de Valparaiso (Chili), affranchi avec un 80 centimes et un 20 centimes bleu « Empire » lauré, oblitérés étoile 6 avec cachet à date « Paris Sénat » du 27 septembre 1870, mention manuscrite « voie de Panama ou Magellan », griffe rouge « PP » et cachet de passage à Londres du 3 octobre, bénéficie d’une estimation de 15 000/20 000 euros.
Une estimation de 70 000/100 000 euros revient à une Gazette des Absents n° 15 à destination de Fou-Tchéou par Hongkong transportée par La Ville de Paris, avec un affranchissement à 80 centimes, pli daté du 12 décembre 1870.
Compter 60 000/75 000 euros pour une lettre transportée par Le Bayard à destination de Cayenne (Guyane), affranchie à l’aide d’un 80 centimes rose « Empire » lauré cachet à date de Paris du 28 décembre 1870, comportant au dos un cachet de transit du 31 décembre de Saint-Nazaire, et arrivée le 14 janvier 1871.
Une lettre postée le 12 octobre 1870 à destination de Kharkhoff (Russie), arrivée le… 12 octobre du calendrier Julien (soit le 23 octobre du calendrier grégorien) vaut 30 000/50 000 euros.
Une autre grosse cote – 30 000/50 000 euros – revient à une collection de marques postales consacrée au département du Lot-et-Garonne (1760-1942) montée sur plus de quatre cents pages d’exposition, accompagnée d’un ensemble d’environ trois cents lettres ou documents…
Madagascar en vedette
On passe à la session du mercredi 20 novembre consacrée aux ex-colonies françaises, avec en vedette Madagascar.
La session ouvre sur une lettre de 1867 de Cochinchine, au départ de Saïgon, à destination de l’île Maurice, avec un impressionnant affranchissement tricolore au type « Aigle Impérial » est estimée 5 000 à 7 500 euros.
Curieux, quatre lots de timbres-monnaie de Côte d’Ivoire (1913-1917) sont proposés dans une fourchette de prix allant de 160 à 360 euros.
Etablissements français dans l’Inde, la série de quatre valeurs de l’« Exposition coloniale internationale Paris 1931 » en feuilles non dentelées, émarge à 8 000/12 000 euros.
Madagascar, un des deux timbres connus dans sa version neuve de la variété de surcharge 25 centimes (au lieu de 5 centimes) sur 10 centimes noir au type « Alphée Dubois » (1889) est estimé 5 000/8 000 euros.
Les experts voient « large » avec une estimation de 12 000 à 25 000 euros pour une lettre affranchie à l’aide d’un timbre à 30 centimes de Madagascar de 1896-1899 coupé et surchargé à la main faute de figurine, oblitéré du cachet à date bleu de Ambohibe du 26 avril 1906, à destination de Surgères en France.
De Madagascar toujours, un panneau de vingt-cinq du 20 francs « Chef sakalave » surchargé « FRANCE LIBRE » (1942), avec marges sur deux côtés, profite d’une estimation de 15 000 à 25 000 euros. « Timbre au tirage restreint, 8 475 exemplaires », précise le vendeur…
Compter 12 000/20 000 euros pour une série de treize réimpressions au type « Sage » surchargés « PORT-SAïD » (1900), du 1 centime noir au 5 francs violet, « normalement sans gomme, timbres très rares, peu d’exemplaires connus et peut-être uniques en série complète ».
Pour La Réunion, une lettre du 12 septembre 1852 de Saint-André pour Bordeaux le 31 décembre 1852, affranchie avec un 15 centimes et un 30 centimes noir sur azuré (les deux premiers timbres de La Réunion), cachet de transit de Nantes, taxée à l’arrivée (35 centimes) pointe à 50 000/60 000 euros.
On reste à La Réunion, avec un 2 francs CFA sur 0,05 franc, blason de Lille (1960), « seul timbre non émis ayant eu une existence officielle avec annulation hexagonale, seulement quelques pièces connues », estimé 3 000/4 000 euros.
Pour débuter une collection, des ensembles des Terres australes et antarctiques françaises sont proposés à des prix allant de 200 (cent quarante timbres non dentelés, 1980-1990, avec des blocs de quatre, deux épreuves), à 2 000 euros (ensemble de 1948 à 2001, complet, plus quelques feuilles, nombreux blocs, etc.), selon la composition.
On arrive, par ordre alphabétique, à Tahiti, dont un timbre-taxe des ex-colonies surchargé « Tahiti/1893/Tahiti » oblitéré sur petit fragment, cachet à date de Papeete/Tahiti du 9 septembre 1893, vaut entre 10 000 et 18 000 euros.
Une « rareté majeure du Togo » (1915), occupation franco-anglaise, surcharge 05 sur 3 pfennig brun, papier sans filigrane, à l’état neuf, dont on indique un tirage de soixante et un exemplaires, est affichée à 14 000/20 000 euros. De la même série, mais « standard », oblitéré, un 50 pfennig carmin et noir, est à 6 000/9 000 euros.
Vente aux enchères des 19 et 20 novembre, à partir de 10 heures, David Feldman International Auctioneers, Chemin du Pavillon, 2, 1218 Le Grand-Saconnex, Suisse. Tél. : 41 (0) 22-727-07-77 et courriel : [email protected].