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Histoires Web mercredi, octobre 2
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On se pose souvent la question du vieillissement des actrices, rarement celle sur celui des acteurs. Comment vieillissent-ils et qu’est-ce que l’âge fait à la fiction ? A fortiori quand ils ont été les sex-symbols de toute une génération ? A cette question, Wolfs, de Jon Watts, diffusé sur la plateforme Apple TV+, aurait pu apporter quelques éléments de réponse : le film organise les retrouvailles cinématographiques de Brad Pitt et de George Clooney, vedettes sexagénaires et amis dans la vie, qui livrent au public leur grande complicité teintée de rivalité exagérée, jouant à l’écran avec le fantôme de la série des films Ocean’s Eleven.

Dans un palace, une magistrate très médiatique se retrouve avec le cadavre d’un gigolo sur les bras. Elle appelle à la rescousse Jack (Clooney), fixeur spécialisé dans le nettoyage de scènes de crime, à qui est dévolu la délicate mission de faire disparaître le corps. Sauf que, grâce à une discrète caméra de surveillance, la direction de l’hôtel a tout vu et envoie en urgence Nick (Pitt), son fixeur attitré. Les deux rivaux aux méthodes diamétralement opposées sont contraints de collaborer.

Ensemble, les voilà embarqués pour une nuit rocambolesque avec, sur le dos, un cadavre qui s’est réveillé et une livraison de drogue qui lance la mafia croate à leurs trousses. La nuit d’enfer façon After Hours (Martin Scorsese, 1985) s’orchestre autour d’une succession de décors et de rebondissements aberrants, qui semblent avoir été générés moins par un scénariste que par une intelligence artificielle. Intrigant dans ses prémices, le film en devient vite anesthésiant à force de surrégime.

Fétiches nostalgiques

Avec sa mise en scène feutrée et son scénario en pilote automatique, Wolfs a des allures de musique d’ascenseur cinématographique : Pitt et Clooney sont en service minimum, certains que leur seule présence, même fantomatique, assurera le succès du film.

Jon Watts, à qui l’on doit les trois derniers volets de Spiderman, perd une occasion en or de filmer le corps de ses acteurs vieillissants. Il préfère les livrer à un film d’action débridé qui, dans sa frénésie, suppose que Clooney et Pitt sont restés les mêmes, ont la même quantité d’énergie qu’à leurs 20 ans. L’âge comme la fiction glissent sur leurs corps riches et célèbres qui n’ont plus aucune émotion à offrir, si ce n’est l’hyperconscience de leur statut de fétiches nostalgiques.

Image patinée, plans fixes au cordeau, scènes de gêne surjouées, Wolfs ressemble d’ailleurs à s’y méprendre à une version longue d’une publicité de la marque Nespresso, dont George Clooney (qui se fait rare au cinéma) est l’indétrônable égérie depuis 2007. En face, rappelons que Brad Pitt a décroché un juteux contrat avec son rival, la marque de café De’Longhi. En somme, le film relève une question assez fascinante sur la porosité de plus en plus flagrante entre univers cinématographique et publicitaire, comme s’il était désormais impossible de filmer un acteur sans importer l’imaginaire commercial auquel il est lié.

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