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Coordinateur scientifique du programme Sentinelles du climat en Nouvelle-Aquitaine, Michaël Guillon ne réalise qu’occasionnellement les suivis de terrain. Il se souvient toutefois très bien de la visite en 2023 d’un site à Saint-Médard-en-Jalles (Gironde), non loin de Bordeaux, où la lande était « complètement grillée ». Au premier passage, rien. Au deuxième, le soulagement : il repère un lézard vivipare, petit reptile brun de quelques centimètres de long. « C’est un peu particulier comme sensation, pour un naturaliste, de se demander si on va réussir à retrouver une espèce que l’on observait juste un an auparavant, raconte-t-il. Il est assez rare de mesurer en temps réel les effets des aléas climatiques extrêmes. »

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En 2022, la France connaît des canicules et une sécheresse exceptionnelles. L’été est alors le plus chaud enregistré depuis 2003. Le sud-ouest de la France n’est pas épargné et plus de 30 000 hectares de forêts sont détruits dans de gigantesques incendies dans le massif des Landes. Deux ans plus tard, l’association Cistude Nature, membre de la fédération France Nature Environnement et qui coordonne Sentinelles du climat, alerte sur les conséquences de cet épisode hors norme : il a provoqué la perte de 80 % des lézards vivipares des Landes, faisant craindre une extinction locale.

Né en 2016, le programme Sentinelles du climat implique naturalistes, gestionnaires et scientifiques, et a pour mission de documenter les effets du réchauffement sur la biodiversité à l’échelle locale. Le lézard vivipare fait partie de la vingtaine d’espèces suivies dans ce cadre, choisies en fonction de leur sensibilité à l’évolution du climat et de leur capacité de déplacement limitée. Chaque année, des observations sont réalisées sur une douzaine de sites où vivent ces reptiles. Elles sont répétées plusieurs fois par printemps, lorsque ces vertébrés sont le plus actifs.

Dans le massif landais, le lézard vivipare se situe dans le sud de son aire de répartition, très vaste, qui s’étend de l’Irlande jusqu’à l’île Sakhaline, au large de la Sibérie, et des Pyrénées au cercle polaire. A la différence d’autres espèces de lézards, celle-ci est adaptée à un climat humide et frais – elle peut même se « congeler » pour survivre à des températures très basses.

« Effondrement complet »

Dans le Sud-Ouest, elle vit à proximité des lagunes et des landes humides typiques de cette région – qui était à l’origine un vaste marais. « Ces joyaux écologiques ont constitué de véritables capsules climatiques au fil des siècles », précise dans un communiqué Olivier Lourdais, chargé de recherche au CNRS de Chizé (Deux-Sèvres). Autre particularité, alors que le lézard vivipare donne naissance – comme son nom l’indique – à des petits déjà formés, la population landaise pond des œufs, sans doute parce que cette forme est plus adaptée au climat.

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