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Histoires Web mercredi, octobre 23
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Ils sont un millier, disséminés dans la péninsule italienne, éloignés de leur province d’origine et des lieux où ils ont commis leurs crimes. Sur leur sonnette, un nom d’emprunt. Lorsqu’ils témoignent lors d’un procès, c’est depuis un bunker sécurisé, sans laisser voir leur visage. Les collaborateurs de justice, aussi appelés « repentis » (pentiti), sont les protagonistes des enquêtes contre la Mafia en Italie depuis plus de trente ans. « Incontournables », selon les magistrats spécialisés. Des « traîtres », pour leurs détracteurs. Ils sont aussi des « morts qui marchent », comme le dit l’expression populaire, tant leur vie ne tient plus qu’à un fil dès lors qu’ils ont décidé de briser l’omerta.

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L’histoire des collaborateurs de justice remonte aux années de plomb, quand la violence politique menaçait l’Etat de droit, dans la décennie 1970. Le premier cadre juridique, défini en 1980, est ainsi dévolu aux affaires de terrorisme. Il s’élargit dix ans plus tard à la criminalité organisée sous l’égide du magistrat sicilien Giovanni Falcone, architecte de la doctrine anti-Mafia du pays. Il avait éprouvé ce système avec un cobaye de choix : Tommaso Buscetta, dit le « boss des deux mondes », ce chef de Cosa Nostra revenu d’Amérique pour tout raconter sur ses anciens complices. Ses confessions ont abouti au grand procès de Palerme, en 1986-1987, où 360 mafieux furent condamnés.

La collaboration appliquée à la criminalité organisée s’est peu à peu érigée en un système précisément codifié, distinguant les magistrats-confesseurs d’un côté, et de l’autre le Service central de protection, déployé pour veiller sur les individus officiellement entrés dans le « programme ». Au total, plus de 5 000 personnes sont concernées, en comptant les familles proches, mais aussi la soixantaine de « témoins de justice », ces citoyens ayant fait le choix de dénoncer des actes mafieux.

« Faire la lumière sur des réalités criminelles opaques »

Les règles sont claires : une fois prise la décision de collaborer, le détenu a cent quatre-vingts jours pour convaincre de sa bonne volonté autant que de la pertinence de ses révélations. Les informations doivent être « nouvelles », « complètes » et « décisives ». En échange, il peut obtenir une réduction de peine, des mesures de protection pour lui et sa famille (relogement, anonymat…), ainsi qu’un revenu mensuel d’environ 2 000 euros par foyer. A la moindre erreur, au moindre trou de mémoire, retour au cachot. C’est ce qui vient d’arriver à Francesco Schiavone, boss historique du clan de Casal di Principe, appartenant à la Camorra, repenti à 70 ans, qui n’a pas convaincu les magistrats napolitains au terme de trois mois d’entretiens.

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