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Sous les mousses de nos jardins se cachent des créatures aussi minuscules que stupéfiantes. Moins de 1 millimètre de long, huit pattes griffues et un corps boudiné : les tardigrades peuvent bien avoir été surnommés « oursons d’eau », ils ne payent pas de mine. Pourtant, les quelque 1 500 espèces du groupe, présentes du fond des océans (– 4 500 mètres) aux sommets de nos montagnes (+ 6 000 mètres) et des pôles à l’équateur, cachent des capacités de résistance inégalées.

Les chercheurs leur ont fait subir les pires sévices, les ont plongés dans l’hélium liquide (– 70 °C) ou dans un four à 150 degrés, les tardigrades ont survécu. Ils leur ont appliqué des pressions phénoménales, de plusieurs milliers d’atmosphères… sans dommage. Les priver d’eau ne les touche pas davantage : ils entrent alors dans un état végétatif qui peut durer plusieurs dizaines d’années.

Pourtant, ce qui fascine le plus les scientifiques reste la capacité de ces bestioles à supporter les rayons ionisants. Pour les humains, la dose mortelle de rayons X est de 8 grays, celle de rayons gamma de 4 grays. Les tardigrades, eux, encaissent des doses respectives de 5 700 et 5 000 grays. Un mystère que la recherche traque depuis des décennies. Une équipe chinoise vient de publier dans la revue Science, le 25 octobre, un article particulièrement éclairant. Il montre, en effet, que pour se défendre l’animal dispose en réalité d’une diversité d’armes.

« Découverte par hasard »

Pour commencer, les scientifiques chinois ont décrypté le génome d’une nouvelle espèce de tardigrades, qu’ils ont baptisée Hypsibius henanensis. « Nous l’avons découverte par hasard, il se trouvait qu’elle était très résistante aux radiations et facile à élever, nous l’avons donc choisie comme modèle », raconte Lingqiang Zhang, biologiste moléculaire, au Centre national d’étude des protéines de Pékin, un des coordinateurs de l’équipe. Les chercheurs ont soumis l’animal à de fortes doses de rayons gamma et ont observé les changements au niveau des gènes. Ils en ont repéré 2 801, pour lesquels l’expression, autrement dit la fabrication de protéines, était modifiée.

Lire aussi (2016) | Article réservé à nos abonnés Quel est le secret du tardigrade, l’animal qui survit à tout ?

Ils ont ensuite classé ces changements et le type de gènes mis en jeu, et ainsi dégagé « trois mécanismes différents de radiotolérance ». Enfin, dans chacun de ces cas, ils ont mis en évidence le gène le plus actif, dont ils ont détaillé l’origine et le mode d’action. Leur résultat le plus spectaculaire se nomme Doda1. D’abord par son origine : ce gène a été acquis par transfert horizontal en provenance d’une bactérie. Au contact du micro-organisme, l’animal aurait purement et simplement capté un gène. L’événement n’est pas exceptionnel, mais il le devient dès lors qu’il s’agit d’acquérir une fonction aussi importante.

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