Meilleures Actions
Histoires Web lundi, juillet 8
Bulletin

« Alors que mon employeur avait connaissance de mon harcèlement, il y a participé et l’a avivé pour me faire taire. J’ai eu cinq bureaux différents entre février 2020 et avril 2021. Cela me répugne d’être le salarié de ces gens, ce que je n’aurais jamais imaginé vu ce qu’ils défendent. » L’ambiance est fratricide, mardi 24 juin, quand Laurent Degousée déroule ce qu’il reproche à Solidaires, son ancien employeur, devant le conseil de prud’hommes de Paris : des conditions de travail invivables et des heures supplémentaires non payées.

Ce juriste de 52 ans, salarié depuis 2010 de l’union syndicale aux 100 000 adhérents et mis à disposition de sa fédération SUD-commerces et services, a saisi la juridiction pour obtenir la résiliation judiciaire de son contrat de travail, en raison de l’existence d’un harcèlement moral généralisé. Il a été licencié entre-temps, en avril, pour inaptitude d’origine professionnelle, notamment après plusieurs tentatives de suicide, dont une reconnue en accident du travail.

M. Degousée explique avoir d’abord été victime de dénigrement puis de menaces de la part de son homologue dans une autre structure de Solidaires, le syndicat SUD-commerces et services Ile-de-France – qui diffère de la fédération nationale du même nom. Depuis 2019, l’affaire secoue régulièrement les instances du syndicat. Les plaintes du salarié se sont accumulées, et, malgré les tentatives de résolution, le bureau national a fini par suspendre, en juin 2023, la fédération qu’animait M. Degousée pour « pratiques antidémocratiques ».

Lire aussi | Article réservé à nos abonnés Entre déni des entreprises et manque de données, l’invisibilisation des suicides liés au travail

A la barre, l’avocate de Solidaires, Isabelle Grelin, est claire : M. Degousée instrumentaliserait ce « conflit entre deux structures » pour faciliter son départ, puisqu’il s’est reconverti pour devenir avocat. « Il n’y a pas de harcèlement dans ce dossier. L’union syndicale a payé du matériel pour qu’il puisse télétravailler, a réglé le conflit et maintenu son salaire à 100 % pendant ses arrêts de travail. » « Tout est déformé. Il veut nous faire payer une grande souffrance dont nous ne sommes pas responsables. On a essayé d’apaiser la situation plusieurs fois », indique au Monde Murielle Guilbert, déléguée générale de Solidaires. Le délibéré est attendu le 16 septembre.

« C’est difficile de se mettre en position d’employeurs »

Certains éléments pointés par Laurent Degousée ne sont pas isolés : plusieurs conflits ont émergé ces dernières années chez Solidaires, aboutissant au départ en 2020 de deux salariés de sa branche Action des salariés du secteur associatif ou d’autres encore chez SUD-industrie. En jeu, chaque fois, le fait que l’union et ses fédérations n’assument pas leurs responsabilités d’employeur, alors qu’elles se battent au quotidien pour améliorer les conditions de travail. « Je n’ai pas eu de visite médicale depuis six ans, pas d’heures supplémentaires, pas de reconnaissance du forfait en jours et une surcharge de travail », décrit un employé.

Il vous reste 38.8% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

Share.
© 2024 Mahalsa France. Tous droits réservés.