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Histoires Web lundi, décembre 23
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Trois fois championne du monde d’escalade dans les années 1980, légende de l’alpinisme dans les années 1990, Catherine Destivelle a prouvé que les femmes grimpaient aussi haut que les hommes. A 64 ans, la pionnière a ouvert la finale des Jeux olympiques d’escalade féminine à Paris, le 10 août, et reste à ce jour la seule femme à avoir reçu un Piolet d’or, « Oscar de l’alpinisme », pour l’ensemble de sa carrière.

Je ne serais pas arrivée là si…

… Si mes parents n’avaient pas ouvert la porte aux rêves. Nous vivions en banlieue sud de Paris, dans la cité du Grand-Vaux, à Savigny-sur-Orge (Essonne). Habiter une cité était un choix, avec une bibliothèque pour tous, l’atelier de peinture de ma mère accessible aux enfants, l’utopie des années 1970 ! Comme nous n’avions pas la télévision, mes sœurs et moi débarquions chez notre institutrice, le jeudi, pour regarder le feuilleton Belle et Sébastien. C’est là que j’ai découvert la montagne, en noir et blanc.

Puis j’ai voulu grimper, vers l’âge de 12 ans. J’étais « vigousse », un peu tête brûlée. Nous étions cinq filles, mais mon père, qui était ingénieur au Centre national d’études spatiales, nous a élevées comme des garçons. On faisait les quatre cents coups, on grimpait aux arbres, aux poteaux, on marchait en équilibre sur les garde-corps des ponts à Paris, sur les rochers en balade dans la forêt de Fontainebleau (Seine-et-Marne).

Mes parents m’ont laissée partir chaque dimanche vers 6 heures pour attraper le train de 8 h 23 à la gare de Lyon, à Paris, et marcher 10 kilomètres dans la forêt. J’étais la plus jeune des cadets du Club alpin français. A l’époque, les premiers grands alpinistes étaient parisiens, grâce à Fontainebleau, où ils pouvaient s’entraîner.

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Et pourtant, vous vous échappiez de Paris pour aller encore plus haut…

Je suis partie quelquefois en cachette pour aller grimper dans le Vercors, je campais dans la montagne. Un dimanche, je suis revenue avec une ophtalmie des neiges, mes parents se sont doutés que je ne l’avais pas attrapée à Fontainebleau ! La semaine suivante, j’ai aperçu mon père sur le quai de la gare. Après ça, j’ai arrêté les bêtises. Mes parents voulaient que je sois bonne élève à l’école et me faisaient confiance le reste du temps.

Un jour, en vacances, alors que nous étions en voiture, j’ai demandé à mon père s’il acceptait de me déposer dans l’Oisans, car je rêvais de faire le tour du massif toute seule. Il m’a dit : « D’accord, je reviens te chercher dans quinze jours. » J’avais 14 ans. Mon père m’a donné la clé pour avancer, la confiance en soi. Ensuite, j’ai rencontré des grimpeurs, des scientifiques sortis des grandes écoles. Ils me disaient : « C’est ton tour », alors j’ai appris à grimper comme un garçon, sans moufter, sans savoir que je montais sur des voies qu’aucune fille n’avait pratiquées à l’époque. Il n’y avait pas de téléphone, pas d’Internet, pas de magazine pour se comparer.

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