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Histoires Web vendredi, octobre 25
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Dans Le Vertige MeToo (Grasset, 336 pages, 22 euros), l’essayiste Caroline Fourest affirme que « tous les #metoo ne se valent pas » et s’interroge sur les risques d’un « nouveau monde » « il suffit d’accuser pour exister ». L’ouvrage a suscité une vive polémique parmi les féministes.

Au moment où des accusations graves sont portées contre l’abbé Pierre, et alors que se déroule le procès des viols de Mazan, où cinquante et un hommes sont accusés d’avoir violé une femme droguée à son insu par son mari, comprenez-vous que la mise en question du mouvement #metoo dans votre livre puisse choquer ?

Au contraire, mon livre arrive au bon moment, puisqu’il parle de tous les bienfaits de #metoo, et notamment du fait qu’il y a davantage d’écho et de médiatisation dans des cas aussi clairs et flagrants que le nombre d’accusations portées contre l’abbé Pierre ou le système de prédation et de viols mis en place par Dominique Pelicot.

En revanche, pendant ce temps, des personnes comme la pédiatre légiste féministe Caroline Rey-Salmon sont accusées à tort [une plainte pour violence sexuelle, déposée après sa nomination comme vice-présidente de la Commission indépendante sur l’inceste et les violences sexuelles faites aux enfants, a été classée sans suite]. Il est regrettable qu’aujourd’hui il ne soit plus possible de défendre un accusé à tort sans passer pour un complice des violeurs ! Car il y a des mises en cause qui ne reposent sur rien – il y en a peu, mais il y en a.

Ce que l’on constate dans le procès de Mazan, c’est que la parole des victimes est encore trop facilement remise en cause. Est-ce bien le moment de la fragiliser en proposant de remplacer, comme vous le faites, le « je te crois » par « je t’écoute » ?

Quand je dis « je préfère “je t’écoute” à “je te crois” », je ne parle pas de la justice, mais du fait que nous sommes tous devenus des juges #metoo au quotidien, sans réfléchir à cette nouvelle responsabilité. Nous devons évidemment être vigilants, prendre très au sérieux la moindre dénonciation d’agression sexuelle ou de viol, et c’est ce pour quoi je me bats depuis des années et continuerai de me battre.

Mais il ne faut pas renoncer au doute cartésien. Il faut commencer par dire « je t’écoute » avant d’être sûr de pouvoir dire « je te crois ». J’ai assisté à un procès stalinien au sein du Collectif 50/50 qui a abouti à broyer une productrice féministe sur une fausse agression à partir d’une lecture complètement absurde et fanatique du « je te crois ». Cette productrice, accusée par une actrice de lui avoir touché la cuisse lors d’une soirée, a d’ailleurs été relaxée par le tribunal de Paris, en mai. C’est cette affaire qui m’a donné envie d’écrire ce livre. Je me dois d’alerter sur les risques d’injustice.

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