Exceptionnelles un temps, les périodes de fortes chaleurs se multiplient désormais et se font plus intenses sous l’effet du réchauffement climatique. La chaleur est l’un des événements météorologiques les plus meurtriers : les fortes températures ont entraîné la mort de plus de 10 420 morts en 2022, 5 167 en 2023 et 3 711 en 2024, rien qu’en France, selon Santé publique France. Plus de 47 000 personnes sont mortes de la chaleur en Europe, en 2023.
Au niveau mondial, le mois de juillet 2023 a été le plus chaud jamais mesuré, selon l’agence européenne Copernicus et l’été 2024 a été le plus chaud jamais enregistré dans le monde, toujours selon Copernicus.
Différents phénomènes sont à l’œuvre. Quelle est alors la différence entre une « vague de chaleur » et une « canicule » ? Qu’est-ce qu’une « plume de chaleur » ou un « dôme de chaleur » ? Que représentent les normales climatiques et comment sont-elles calculées ? Le Monde vous propose un lexique pour comprendre ces termes météorologiques.
Qu’est-ce qu’une vague de chaleur ?
On parle de « vague de chaleur » lorsqu’on observe des températures anormalement élevées pendant plusieurs jours successifs. Météo-France explique cependant qu’« il n’existe pas de définition universelle du phénomène ». Deux critères permettent de caractériser une vague de chaleur : les niveaux de température et la durée de l’épisode. Or, ces critères varient selon les régions du monde et les domaines considérés (caractérisation d’un point de vue climatologique, activité de recherche, dispositif de vigilance météorologique).
En France, « pour répondre aux critères cumulatifs d’une vague de chaleur, l’indicateur thermique national [la température moyenne mesurée à l’échelle du pays] doit être supérieur ou égal pendant un jour à 25,3 °C ; doit être supérieur ou égal à 23,4 °C pendant au moins trois jours », poursuit Météo-France.
Le recensement des vagues de chaleur depuis le milieu du XXe siècle montre une augmentation de ces événements climatiques, insiste le service météorologique. Sur les quarante-neuf vagues de chaleur détectées depuis 1947, neuf ont eu lieu avant 1989, dix-sept avant 2000, et trente-deux depuis. « On observe des vagues de chaleur de plus en plus tôt dans la saison, dès la mi-juin à l’échelle nationale (comme en 2005 ou en 2022) et aussi de plus en plus tard dans la saison, après le 15 août (depuis 2001) », souligne Météo-France.
Depuis 2010, il y a eu vingt-cinq vagues de chaleur (seules les années 2014 et 2021 n’en ont pas subi), plus que sur la période 1947-2000. Météo-France prévient que « l’Hexagone doit se préparer à connaître un réchauffement moyen lié aux activités humaines de + 4 °C par rapport à la période pré-industrielle d’ici à 2100 et de + 2,7 °C vers 2050 » et que cela aura pour conséquence de voir des vagues de chaleur arriver plus tôt, entre mi-mai et début juin, selon les scénarios et durer plus longtemps, jusqu’à la fin du mois de septembre.
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Par ailleurs, « la probabilité d’être en vague de chaleur augmente fortement au cœur de l’été », avec quasiment une chance sur deux de se produire dans une France à + 2,7 °C, contre « seulement une chance sur dix sur la période 1976-2005 ». Le nombre de jours de vagues de chaleur sera, lui, « multiplié par cinq dans une France à + 2,7 °C et par dix dans une France à + 4 °C ».
Quand peut-on parler de canicule ?
Lorsque les températures grimpent, on utilise volontiers le terme de « canicule ». Pourtant, la définition de ce phénomène est très précise et varie selon les régions. « Le terme canicule désigne un épisode de températures élevées, de jour comme de nuit, sur une période prolongée (au moins trois jours) », détaille Météo-France, qui précise que « pour les identifier, les météorologues de Météo-France ont défini des seuils de température et de durée qui varient selon les départements ».
Ainsi, Météo-France estime que la canicule sera avérée dans les Deux-Sèvres lorsque des températures minimales de 35 °C le jour et 20 °C la nuit seront observées. La Corrèze, elle, sera considérée en canicule lorsque les températures dépasseront 36 °C le jour et 19 °C la nuit. A Paris, ces seuils sont de 31 °C le jour et 21 °C la nuit, et à Marseille de 35 °C le jour et 24 °C la nuit.
Météo-France relève, par ailleurs, deux « épisodes de canicules remarquables depuis 1950 » : le premier en août 2003 et le deuxième en juillet 2019.
Qu’est-ce qu’une plume de chaleur ?
Parmi les phénomènes météo divers, c’est une « plume de chaleur » qui avait touché l’Europe à la mi-juin 2022. La température maximale avait été enregistrée à Montoro, dans la province de Cordoue, dans le sud de l’Espagne, avec 42,9 °C.
Une « plume de chaleur » correspond à une remontée d’air chaud, géographiquement étroite, pouvant ressembler à une plume ou une langue d’air chaud sur les cartes. Ce n’est pas un dôme de chaleur, puisque le phénomène est dynamique et non pas bloqué au-dessus d’une zone.
La « plume » du début de l’été 2022 résultait de l’air chaud qui était remonté d’Afrique du Nord en passant par la péninsule Ibérique. Christophe Cassou, climatologue et directeur de recherche au Centre national de la recherche scientifique (CNRS), avait décrit sur Twitter (aujourd’hui X) une « vague de chaleur par advection (transport d’un air chaud et sec par les vents de sud) ».
Cette plume de chaleur était associée à une goutte froide située au large de la péninsule Ibérique. Il s’agissait d’une dépression isolée avec des vents cycloniques qui tournaient dans le sens inverse des aiguilles d’une montre, faisant ainsi remonter l’air chaud.
Quelle est la différence avec un dôme de chaleur ?
Le « dôme de chaleur » est un phénomène météorologique lié à la présence d’un anticyclone de blocage qui persiste à un même endroit, provoquant la stagnation des masses d’air chaud. Cette zone de haute pression favorise également la descente de l’air, qui, sous l’effet de la compression, réchauffe l’atmosphère. A mesure que la chaleur piégée continue de se réchauffer, le système agit comme un couvercle sur une casserole.
C’est ce phénomène qui a touché la France et une partie de l’Europe à l’été 2023 et qui va s’installer à partir du 27 juin dans l’Hexagone.
Météo France a placé treize départements en vigilance orange canicule pour le 28 juin et prévoit « un épisode caniculaire précoce dont la durée », et l’« extension géographique progressive vers le nord, nécessitent une vigilance particulière ».
Que sont les normales climatiques ?
Les normales climatiques sont des références qui servent à représenter le climat sur un lieu et pour une période donnés. Elles concernent toutes les variables du climat (température, précipitation, vent, ensoleillement, etc.). Ces indicateurs sont calculés par Météo-France sur trente ans et mis à jour toutes les décennies.
L’organisme météorologique a donc entrepris, en 2021, le calcul de nouvelles normales sur la période 1991-2020. Elles sont utilisées depuis la fin de juin 2022. « Les normales 1981-2010 étaient représentatives du climat moyen sur une période autour des années 1990 et ne représentaient plus le climat actuel dans le contexte du changement climatique, notamment en matière de température », explique Météo-France.
En raison de ce changement, « ces nouvelles “normales climatiques” sont loin de décrire notre climat normal d’il y a encore quelques décennies », insiste le service météorologique. Depuis 1900, la température moyenne en France s’est élevée de 1,8 °C. Sur la période 2011-2020, la hausse a atteint + 0,6 °C par rapport aux dix années précédentes, marquant la plus forte progression observée entre deux décennies depuis le début du XXe siècle.
Qu’est-ce qu’un îlot de chaleur urbain ?
La ville et la campagne n’emmagasinent pas la chaleur de la même manière. Dans les zones rurales, la végétation et les sols perméables évacuent, grâce à l’énergie solaire, l’eau qu’ils puisent ou qu’ils contiennent. Ce phénomène d’« évapotranspiration » a une vertu : les végétaux et les sols n’accumulent pas d’énergie solaire qu’ils pourraient restituer la nuit.
A l’inverse, en ville, cette énergie solaire est absorbée et stockée par les bâtiments et les sols en bitume. Lorsque la nuit tombe, la température baisse, mais les surfaces minérales imperméables dégagent dans l’air la chaleur accumulée durant la journée, empêchant l’atmosphère urbaine de se refroidir autant qu’à la campagne. C’est ce différentiel de température qui correspond à « l’îlot de chaleur urbain », un phénomène qui se produit « surtout la nuit et pendant les épisodes de canicule », explique Météo-France. C’est d’ailleurs « entre 4 et 6 heures du matin », que l’îlot de chaleur urbain « est le plus fort ».
En France, Paris (+ 6,5 °C, en moyenne, après une journée d’été bien ensoleillée), Grenoble (+ 5,5 °C), Lille (+ 5 °C) et Clermont-Ferrand (+ 5 °C) sont les villes les plus exposées à l’îlot de chaleur urbain, poursuit Météo France.