Le Parti socialiste (PS) agite la menace d’une censure s’il n’obtient pas des « concessions remarquables » du gouvernement sur le budget 2025. Le PS a réclamé, lundi 6 janvier, une véritable « négociation » sur le sujet, précisant que le gouvernement lui a déjà fait « une proposition de modification » de la contestée réforme des retraites.
En lançant lundi des discussions avec les partis politiques représentés au Parlement, les ministres de l’économie, Eric Lombard, et des comptes publics, Amélie de Montchalin, espèrent les associer à la confection d’un budget de « compromis » qui puisse être adopté à l’Assemblée nationale, où l’ancien premier ministre Michel Barnier avait buté sur une motion de censure, le 4 décembre 2024.
Cinq ministres, dont Catherine Vautrin (travail et santé) et Amélie de Montchalin, recevront par ailleurs, à partir de mardi, les présidents des groupes parlementaires pour tenter de « coconsruire » le budget 2025 de la Sécurité sociale.
Ce lundi a eu lieu « un rendez-vous que nous espérons utile, mais nous avons rappelé (…) que nous n’étions pas prêts à nous vendre et que, s’il n’y avait pas des concessions remarquables pour les Françaises et les Français, nous étions prêts à nouveau à prendre nos responsabilités, y compris par la censure », a déclaré le premier secrétaire du PS Olivier Faure, à l’issue de l’entrevue de presque deux heures à Bercy.
« Nous ne le souhaitons pas ; nous souhaitons des avancées, qu’il y ait un dialogue fructueux », a-t-il ajouté : « Nous voulons une négociation. » Alors que le gouvernement a dit, lundi, s’attendre à un dialogue plus « fécond » avec les partis de gauche qu’avec le Rassemblement national, « il y a eu une proposition de modification, d’évolution de la réforme de la retraite », s’est félicité le président du groupe socialiste au Sénat, Patrick Kanner.
« Ni pessimiste ni optimiste »
Avant de rencontrer les élus socialistes, Eric Lombard avait estimé sur France Inter que « des convergences [étaient] possibles avec le Parti socialiste, mais aussi avec le Parti communiste et avec les Verts ». L’objectif du gouvernement minoritaire est de « parvenir à un accord ou, a[u] minim[um], un accord de non-censure », a-t-il déclaré.
Les rencontres sont prévues jusqu’à la déclaration de politique générale du premier ministre, François Bayrou, le 14 janvier, avec l’espoir d’avoir un budget « courant février », selon Amélie de Montchalin. Reçu le premier, Marc Fesneau, président du groupe MoDem à l’Assemblée nationale, a affirmé à sa sortie que des « compromis » budgétaires étaient possibles, notamment avec les socialistes sur la « justice fiscale » et la « justice sociale ».
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Ecologistes et communistes sont attendus mercredi. Eric Coquerel (LFI) s’entretiendra avec Eric Lombard jeudi après-midi, a rapporté son entourage à l’Agence France-Presse (AFP). Vendredi, ce sera au tour du Rassemblement national (RN).
« On est ni pessimiste ni optimiste. On va travailler, et nous allons voir ce qu’il se passe. Mais, à ce stade-là, ce serait bien difficile de faire des pronostics », a déclaré Olivier Faure, interrogé sur la possibilité d’un accord sur le budget. Jean-Luc Mélenchon a lui prévenu que « les “insoumis” ne sont pas engagés par la non-censure négociée par le PS ». « Le NFP n’a été ni informé ni saisi auparavant », a-t-il affirmé sur X.
Le gouvernement exclu les hausses d’impôts
Eric Lombard s’est dit ouvert au dialogue concernant la réforme des retraites, y compris l’âge de départ à 64 ans, à condition de ne pas détériorer davantage l’équation financière du système. Mais il a prévenu qu’il ne s’alignerait « pas nécessairement » sur les lignes rouges de la cheffe de file des députés du RN, Marine Le Pen. Celle-ci avait obtenu de Michel Barnier des concessions de dernière minute sur la taxe sur l’électricité notamment, sans pour autant lui épargner la censure.
Pour 2025, le gouvernement vise un déficit public compris « entre 5 % et 5,5 % » du PIB, après un niveau attendu « autour de 6,1 % » pour 2024, selon Eric Lombard. Cela nécessitera un effort budgétaire « autour de 50 milliards d’euros », moins que les 60 milliards qu’ambitionnait le gouvernement précédent, « essentiellement » par des économies.
Concernant la fiscalité, le gouvernement souhaite maintenir la surtaxe sur les bénéfices des grandes entreprises, censée rapporter quelque 8 milliards d’euros cette année, la taxe sur les rachats d’actions et celle sur les billets d’avion. Il a en revanche exclu des hausses d’impôts « qui pénaliseraient le pouvoir d’achat de la classe moyenne », écartant ainsi un relèvement de la TVA. Concernant les hauts revenus, « on peut trouver des mécanismes qui visent à ce que les personnes qui ont des revenus importants participent à l’effort fiscal », a estimé Eric Lombard.