Dans son âge classique, le cinéma japonais a admirablement reflété l’ordre rituel de la vie quotidienne. Mais, une fois l’ère des studios condamnée, à partir des années 1960 et surtout 1970, il s’est montré tout aussi apte à la destruction par de soudains coups de folie, élans ravageurs et autres embardées baroques. Avec les décennies suivantes, la rage et le nihilisme sont allés croissant, repoussant toujours plus loin les limites de la violence graphique. Dans un torrent d’images cathartiques et de régimes d’intensité, le Japon s’inventait un cinéma de l’excès. Plusieurs éditions vidéo récentes témoignent de cette irrépressible montée de fièvre qui ne survivra pas longtemps au XXIe siècle : La Vengeance de la sirène (1984), de Toshiharu Ikeda, Crazy Family (1984), de Sogo Ishii, et Ichi the Killer (2001), de Takashi Miike, le tout proposé par l’éditeur Carlotta, à la faveur de versions fraîchement restaurées.
La Vengeance de la sirène est sans nul doute le plus fort du lot, et la principale redécouverte, puisque l’œuvre était jusqu’alors inédite en France. Le réalisateur, Toshiharu Ikeda, peu connu en France, avait fait ses armes dans le film érotique, lors d’un passage éclair à la Nikkatsu alors au bord du dépôt de bilan, avant de tourner celui-ci au sein de la Director’s Company, société indépendante qu’il fonde avec un collectif de réalisateurs, parmi lesquels Kiyoshi Kurosawa et Shinji Somai (1948-2001).
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