On les a connus dans un camping-car. C’était en 2001. Parqué dans le sous-sol du Centre Pompidou, à Paris, le mobil-home, déglingué par des milliers de kilomètres en vadrouille, semblait écrasé sous le poids du bazar accumulé par ses occupants. Derrière la fenêtre, entre une tête de cerf empaillée et un lustre en cristal, on pouvait d’ailleurs les voir, vautrés devant la télé ou en train de mitonner un casse-dalle. Et, quand la tribu s’en allait pour aller se planter direct quelques mètres plus loin, l’accident laissait sans voix.
Cette virée ras les pneus s’intitulait Une vie inutile. Elle introduisait le collectif belge Peeping Tom. Un nom-manifeste qui posait d’emblée sur la table de camping le kil de rouge, les cris et chuchotements, le linge sale qui déborde. Mise à sac de l’intime pour spectateurs rivés au trou de la serrure. « Il y a au départ, chez nous, l’idée de parler des relations humaines, familiales, puis cette envie d’entrer, comme au cinéma, dans la tête des gens, de lire les pensées en montrant toutes les couches qui coexistent en chacun, expliquent les chorégraphes Gabriela Carrizo et Franck Chartier, copilotes de Peeping Tom. On est très intéressés par les mondes parallèles reliés à l’inconscient, aux tabous, aux non-dits… » Ils citent parmi leurs sources d’inspiration les romans de Fiodor Dostoïevski, de Kobo Abe ou de Jorge Luis Borges, le cinéma de Shohei Imamura et de Satyajit Ray.
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