La parole est aux accusés. Lundi 16 décembre, après trois mois et demi d’audiences, les 51 hommes jugés au procès des viols de Mazan ont une dernière occasion de s’exprimer. C’est Dominique Pelicot, l’accusé principal, qui s’est exprimé le premier, commençant par saluer le « courage » de son ex-femme, Gisèle Pelicot, qu’il avait droguée pendant une décennie pour la violer et la livrer à des dizaines d’hommes recrutés sur Internet.
« Je regrette ce que j’ai fait, faire souffrir [ma famille] depuis 4 ans [la date de la révélation des faits], je leur demande pardon », a poursuivi le septuagénaire, dans sa dernière prise de parole avant le verdict attendu jeudi de ce procès emblématique des violences sexuelles.
Les autres accusés, des hommes âgés de 27 à 74 ans, doivent se succéder dans la journée à la barre dans l’ordre auquel leurs cas avaient été étudiés par la cour, avec d’abord Jean-Pierre M., 63 ans, le seul à ne pas être poursuivi pour des faits sur Gisèle Pelicot mais pour avoir reproduit le même procédé de soumission chimique, en compagnie de Dominique Pelicot, sur sa propre épouse. Puis, la cour criminelle de Vaucluse se retirera pour délibérer, pour un verdict très attendu, a priori jeudi.
Ces prises de parole, à la barre du tribunal d’Avignon pour les 32 accusés comparaissant libres ou depuis leur box pour les 18 accusés détenus [le 51e, en fuite, est jugé in absentia], se feront dans des conditions strictement définies. « Ce moment doit pouvoir permettre à chaque accusé d’ajouter éventuellement un mot. Il ne s’agit pas de répéter ce qui a pu être plaidé par les avocats ces derniers jours. Il est évident que ce qui a déjà été dit serait répétitif et je pourrais dans ce cas couper l’intervention », avait prévenu jeudi le président de la cour, Roger Arata.
« Un message d’espoir aux victimes de violences sexuelles »
Dans son réquisitoire, les 25, 26 et 27 novembre, l’accusation avait requis la peine maximale possible, soit 20 ans de réclusion criminelle, contre Dominique Pelicot, le « chef d’orchestre » de cette décennie de viols sur son épouse. Les autres réquisitions s’étaient étalées de 10 à 18 ans de réclusion contre les 49 accusés poursuivis pour viols aggravés, quatre ans de prison étant demandés contre le dernier, seulement poursuivi pour « attouchements » sur Gisèle Pelicot.
La cour suivra-t-elle ces réquisitions, plus sévères que la moyenne générale des condamnations pour viols en France, qui était de 11,1 ans en 2022, selon le ministère de la Justice ? Ou, à l’inverse, osera-t-elle suivre la trentaine de demandes d’acquittement formulées par les avocats de la défense, selon qui leurs clients ont été « manipulés » par le « monstre », le « loup » ou encore « l’ogre » Dominique Pelicot, et « n’avaient pas l’intention » de violer son ex-épouse ?
Par sa décision, la cour enverra « un message d’espoir aux victimes de violences sexuelles », avait en tout cas espéré lors du réquisitoire Laure Chabaud, l’une des deux représentantes du ministère public à ce procès devenu également emblématique des questions de soumission chimique et de consentement. Cette dernière semaine va clore une procédure hors norme, débutée le 2 septembre à Avignon, au puissant retentissement national et international.
Une fois les dernières paroles des accusés exprimées, la cour se retirera pour délibérer, un processus « prévu pour durer trois jours », avait précisé M. Arata vendredi. Les cinq magistrats professionnels de la cour criminelle donneront alors leur verdict, « en principe jeudi à 9 h 30 », avait ajouté le magistrat ; mais, « si jamais nous avions besoin de temps supplémentaire, nous pourrions décaler le prononcé du délibéré au jeudi après-midi ou au vendredi matin ».