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Ses ruelles tortueuses, sa mosquée du XVIe siècle et ses maisons ocre ont fait la réputation d’Agadez. Inscrite au Patrimoine mondial de l’Unesco, la cité historique aux portes du désert est plus que jamais menacée par les inondations au Niger. Les débordements de cours d’eau ne sont plus rares dans ce pays désertique, mais cette saison des pluies est particulièrement dévastatrice, avec au moins 270 morts et plus de 700 000 sinistrés. Selon les services météo nigériens, il pleut « régulièrement » sur Agadez, y compris dans les zones où habituellement « la pluie ne tombe jamais ».

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Abdourahamane Tourawa, ancien maire de cette ville située à plus de 900 kilomètres au nord-est de la capitale, Niamey, relève « le caractère particulièrement agressif des pluies » qui s’abattent sur sa ville cette année. « La vieille ville d’Agadez subit beaucoup de dégâts, des mares débordent, beaucoup de maisons se sont effondrées, même la grande mosquée n’est pas épargnée », rapporte à l’Agence France-Presse (AFP) celui qui est également conseiller du sultan d’Agadez. « Le changement climatique, engendrant de fortes pluies, représente un danger pour la vieille ville. Une centaine de maisons et murs se sont déjà effondrés », s’alarme Ali Salifou, le conservateur de la ville.

Agadez, qui signifie « visiter » en tamacheq, la langue des Touareg, était la perle du tourisme nigérien et une étape incontournable du rallye Paris-Dakar quand la course traversait le Sahara, avant que l’insécurité qui mine la région mette un coup de frein aux visites. Avec ses ruelles tortueuses et ses maisons ocre construites en banco (de l’argile mélangée avec de la paille), la ville fut jadis un carrefour exceptionnel du commerce caravanier.

Coquillages et arabesques

Agadez est réputée pour sa célèbre mosquée au minaret de 27 mètres érigée en 1515 et pour l’imposant palais du sultan datant d’entre 1430 et 1449, empreinte du passé glorieux des « hommes bleus », surnom des Touareg en référence à la couleur de leurs tenues. Elle couve d’autres reliques : la maison d’Heinrich Barth, où avait séjourné l’explorateur allemand en 1850, ou la « maison du boulanger », à l’intérieur orné de coquillages et d’arabesques, qui avait servi de cadre à une scène du film Un thé au Sahara (1990), de l’Italien Bernardo Bertolucci.

Le centre historique, qui compte 20 000 habitants, est inscrit au Patrimoine mondial de l’Unesco depuis 2013. Les monuments emblématiques sont encore « dans un état acceptable », mais « les habitations et autres monuments à valeur historique et religieuse sont menacés », prévient Ali Salifou. « Tous les joyaux de notre patrimoine subissent les assauts de saisons pluvieuses plus violentes et abondantes », confirme à l’AFP Rhissa Feltou, un autre ancien maire d’Agadez.

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Au début de septembre, le général Ibra Boulama Issa, gouverneur d’Agadez, est allé constater une « inondation » dans la cour de la mosquée. Selon lui, l’édifice nécessite un « renforcement ». De récentes photos montrent des piliers de cette mosquée séculaire rongés par les eaux et des maisons éventrées ou réduites en tas de gravats. Selon Mahamat Souleymane, le muezzin de la mosquée, l’absence ou le mauvais entretien « des systèmes d’évacuation des eaux de ruissellement » menace la vieille ville.

L’absence d’entretien régulier, faute de moyens pour une communauté qui tirait ses revenus du tourisme, est un autre défi. « Avec le peu d’argent qu’on glane ici et là, on ne peut pas entretenir les bâtiments et laisser la famille le ventre vide », déplore Alhassane Manou, un ancien vendeur de souvenirs. « L’inscription au Patrimoine mondial n’a pas eu les effets escomptés. Il faut que la population bénéficie de projets lui permettant de sauvegarder et d’entretenir ce joyau architectural », tranche Abdourahamane Tourawa.

Des bâtiments en béton

Car au-delà des aléas climatiques, la surpopulation de cette ville, devenue un point de passage pour de nombreux migrants africains qui veulent rejoindre l’Europe, met en péril le patrimoine historique. Cela engendre une « production exponentielle de déchets, qui constitue un problème », confirme l’architecte Abdel Rachid Idrissa Massi, qui a participé à la réhabilitation d’une centaine de maisons et de la mosquée, notamment avec un financement de l’Union européenne (UE).

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Certains propriétaires démolissent les anciennes maisons pour construire des « bâtiments en béton » et « cela dénature » l’originalité de la cité, s’indigne-t-il. Un constat corroboré par l’Unesco, qui relève une « altération » de « l’authenticité » de la ville, « menacée » par le recours aux « matériaux modernes » de construction. « Ceux qui ne veulent pas qu’on utilise des matériaux modernes dans la vieille ville doivent s’engager pour venir sauver la ville. Les colmatages des maisons ne suffisent plus », répond Abou Saïd Ahmed, chef du quartier Akanfaya.

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Mardi 24 septembre, l’UE a accordé une aide exceptionnelle de 5,4 millions d’euros aux pays sahéliens touchés par les inondations – dont 1,35 million pour le Niger – afin de « fournir une aide immédiate et de répondre aux besoins les plus urgents ».

Le Monde avec AFP

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