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Les attaques djihadistes continuent d’agiter le nord du Mozambique au moment où pourrait reprendre le projet gazier géant de TotalEnergies à Afungi. Les insurgés, affiliés à l’organisation Etat islamique (EI), ont multiplié en mai les attaques, frappant les esprits dans ce pays d’Afrique australe.

Ce mois-ci, deux offensives particulièrement meurtrières ont visé l’armée mozambicaine au Cabo Delgado. Dans une première, l’EI a revendiqué la mort de onze soldats de Maputo mais, d’après un expert en sécurité contacté par l’Agence France-Presse (AFP), le bilan définitif est de dix-sept morts. Dans un deuxième assaut, cette fois sur un avant-poste, confirmé par des sources dans l’armée, les insurgés ont affirmé avoir tué dix membres des forces de sécurité.

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Le groupe armé avait déjà mené deux opérations spectaculaires début mai : un raid sur une réserve animalière qui a coûté la vie à au moins deux rangers, puis une embuscade ayant causé la mort de trois soldats de l’armée rwandaise, qui a communiqué ses pertes à la différence de son homologue mozambicaine. Sans oublier l’attaque déjouée d’un navire océanographique russe, pris pour cible par des « pirates » d’après son message de détresse rapporté par les médias locaux. Celle-ci pourrait aussi leur être imputée.

« Il y a un lien de cause à effet » entre ces attaques et le projet offshore de TotalEnergies, observe auprès de l’AFP Fernando Lima, documentant l’insurrection avec la plateforme Cabo Ligado. « Car certaines actions correspondent à des annonces importantes », souligne-t-il, en référence au prêt de 4,7 milliards de dollars consenti mi-mars par l’agence américaine de crédit à l’exportation pour le projet d’Afungi.

L’insurrection reparaît

Mise au second plan ces derniers mois par les violences post-électorales puis les trois cyclones ayant frappé le pays, l’insurrection reparaît en même temps que les activités liées au futur chantier. « Les insurgés voient passer plus de véhicules, des chargés de mission blancs. Il y a plus d’activité visible dans le paysage, c’est une incitation à des attaques », décrit Jean-Marc Balencie, du cabinet Attika Analysis, qui a longtemps travaillé sur le Cabo Delgado.

Durant les quatre premiers mois de l’année, l’ONG Acled, qui collecte des données sur les zones de conflit, a recensé 80 incidents. La tendance est de nouveau à la hausse, mais elle est en partie liée à la fin de la saison des pluies rendant les routes de nouveau praticables.

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Le Rwanda n’a jamais compté autant de troupes au Mozambique depuis le début du déploiement en juillet 2021 après l’attaque de Palma, qui a mis à l’arrêt le projet Afungi. Leur nombre a été porté à environ 5 000, selon différentes déclarations d’un porte-parole militaire de Kigali, à la suite notamment de la prise en mai 2024 de Macomia, chef-lieu de district que les insurgés ont tenu et pillé plus d’une journée.

Le PDG de TotalEnergies, Patrick Pouyanné, a jugé vendredi 23 mai que la situation s’est « fortement améliorée ». « Ce qui ne veut pas dire qu’il n’y a pas des incidents sporadiques », a-t-il convenu. L’attaque sanglante de Palma en mars 2021 a laissé un bilan très lourd de 1 402 civils tués ou disparus, selon le journaliste indépendant Alexander Perry. Acled a dénombré 801 morts, civils et combattants compris. « Des événements du même ordre (…) ne pourraient pas se reproduire », a assuré Patrick Pouyanné.

Les populations rurales, premières victimes

La concentration des forces au Cabo Delgado « permet aux insurgés de mener des opérations facilement dans la province de Niassa », estime un officier militaire mozambicain sous couvert d’anonymat : « Ils ont compris qu’une attaque dans cette zone pourrait attirer l’attention. »

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Les dernières attaques passent sous les radars médiatiques, en raison de la discrétion des autorités mozambicaines et de l’isolement de ces zones démunies, mais les populations rurales sont les premières victimes de l’insurrection.

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« Plus de 25 000 personnes ont été déplacées au Mozambique en l’espace de quelques semaines », a détaillé la semaine passée le Haut-Commissariat pour les réfugiés (HCR). Elles sont venues s’ajouter au 1,3 million de déplacés depuis le début du conflit en 2017, d’après les Nations unies. « Le regain d’intensité du conflit touche des régions auparavant considérées comme plutôt stables », observe le responsable pour le Mozambique du HCR, Xavier Creach.

Un bulletin de son agence, datant de ce mois, évoque le « déplacement d’environ 2 085 personnes » à pied dans la province de Niassa, après l’attaque du village de Mbamba. « Les femmes de Mbamba ont rapporté avoir été témoins de violences extrêmes, notamment de décapitations et de meurtres », relate le rapport. Plus de 6 000 personnes sont mortes dans le conflit depuis qu’il a éclaté, d’après Acled.

Le Monde avec AFP

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