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La Cour suprême du Mexique a rejeté, contre toute attente, mardi 5 novembre, un recours en annulation d’une réforme controversée du système judiciaire voulue par le camp de la présidente de gauche Claudia Sheinbaum, épargnant au pays une crise politique majeure entre la présidence et le pouvoir judiciaire. « Les présents recours en inconstitutionnalité sont rejetés », a écrit la Cour dans son arrêt après plus de cinq heures de délibérations publiques.

Ce recours avait été déposé par deux partis d’opposition, vent debout contre cette réforme, dont la pierre angulaire est l’élection de tous les juges et magistrats du pays au suffrage universel à partir de juin 2025, une première mondiale.

Une majorité qualifiée de huit juges sur les onze que compte la Cour suprême menaçaient de voter pour l’annulation. Mais le changement de camp à la dernière minute de l’un d’entre eux a fait basculer le rapport de force.

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Promulguée à la mi-septembre par l’ancien chef de l’Etat Andres Manuel Lopez Obrador après un processus d’adoption complexe par le Parlement national et ceux d’une majorité d’Etats, la réforme est défendue avec ardeur par la nouvelle présidente Sheinbaum, qui a été investie le 1ᵉʳ octobre.

Lutter contre la « corruption », le « népotisme » et les « privilèges »

Largement majoritaire au Parlement, la gauche justifie cette réforme pour lutter contre la « corruption », le « népotisme » et les « privilèges » des juges non-élus. « Je salue le fait que la raison, la décence, la légalité aient prévalu », a déclaré à la presse le président du Sénat, Gerardo Fernandez Noroña, après la décision de la Cour.

Un projet d’arrêt préparé par un des juges de la Cour, Juan Luis Gonzalez Alcantara, annulait partiellement la réforme en déclarant constitutionnelle l’élection au suffrage universel des magistrats de la Cour suprême, mais pas celle des juges de rang inférieur.

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Pour être adopté, cet arrêt devait être approuvé par au moins huit des onze juges de la Cour suprême. Jusqu’à mardi, seules trois magistrates considérées comme proches de la gauche avaient annoncé qu’elles voteraient contre. Mais contre toute attente, elles ont été rejointes en début d’audience par un de leurs collègues, qui a durement certes critiqué la réforme mais a refusé de la déclarer contraire à la Constitution. Annuler la réforme consisterait à « répondre à une folie apportée au Texte suprême [la Constitution], par une autre folie équivalente », a justifié ce juge, Alberto Pérez Dayan.

Le Mouvement pour la régénération nationale (Morena, gauche), au pouvoir depuis 2018, accuse le système judiciaire d’être au service d’une élite conservatrice. L’opposition et les fonctionnaires concernés, mobilisés depuis des semaines, dénoncent quant à eux une remise en cause de l’indépendance de la justice. Des manifestants s’étaient réunis pendant les débats, retransmis en direct sur Internet, devant le siège de la Cour suprême, à Mexico.

Inquiétude à Washington

Les Etats-Unis – où les juges dans les Etats fédérés sont élus et leurs mandats régulièrement remis en jeu, contrairement aux juges fédéraux – affirment que cette réforme menace leurs investissements privés au Mexique, qui ont besoin de stabilité juridique.

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Fin août, l’ambassadeur américain à Mexico, Ken Salazar, avait provoqué la colère du gouvernement mexicain en affirmant que la réforme allait « faciliter l’influence des cartels et d’acteurs malveillants sur des juges sans expertise », et il avait évoqué un « risque majeur pour le fonctionnement de la démocratie au Mexique ».

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Avec la « politisation du système judiciaire », les investisseurs pourront se demander si « les désaccords entre les milieux d’affaires et le gouvernement seront résolus d’une manière impartiale », s’est interrogée pour sa part la société britannique Capital Economics dans une note à ses clients.

Les analystes craignaient qu’une annulation de la réforme judiciaire par la Cour suprême ne déclenche une crise constitutionnelle d’une gravité sans précédent. La présidente Sheinbaum estimait que la plus haute instance du pouvoir judiciaire fédéral du pays n’avait pas le pouvoir d’annuler une réforme sans violer elle-même la Constitution. « On ne peut pas revenir sur ce qu’a décidé le peuple » et sur ce « qui fait déjà partie de la Constitution », avait-elle encore affirmé mardi.

Le Monde avec AFP

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