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Histoires Web lundi, septembre 16
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Au cœur de l’été, les nouvelles normes européennes de sécurité des automobiles ont commencé à entrer en vigueur dans une grande indifférence, comme toutes ces mesures techniques qui semblent aller de soi. Après tout, l’amélioration de la sécurité routière est une cause assez consensuelle – nul ne souhaite tuer, ou être tué, dans un accident de la route –, et le renforcement des véhicules par l’innovation est un moyen qui échappe à toute forme de débat ou de discussion. Derrière des mesures en apparence indolores se dissimule pourtant tout un impensé politique : celui d’un certain rapport à la technologie, investie de toutes sortes de pouvoirs et envisagée comme unique pourvoyeuse de solutions à chaque problème – y compris à ceux dont elle est responsable.

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Ces nouvelles normes automobiles sont un cas d’espèce. Depuis le 7 juillet, tout véhicule (neuf) à quatre roues commercialisé dans l’Union européenne doit être équipé d’une myriade de systèmes électroniques et de capteurs permettant l’aide au maintien de la trajectoire, le freinage d’urgence autonome, l’adaptation « intelligente » de la vitesse, l’alerte en cas de distraction ou de somnolence du conducteur, la détection d’obstacles à l’arrière du véhicule, etc.

Voitures et camions devront aussi avoir passé l’épreuve de nouveaux crash-tests plus exigeants, ce qui va mécaniquement conduire à leur alourdissement, relève l’UFC-Que choisir. Il est impossible d’anticiper l’impact que ces mesures auront sur l’accidentologie, mais il est certain qu’elles contribueront non seulement à accroître la quantité d’énergie nécessaire à faire rouler nos voitures, mais aussi à aggraver leur empreinte environnementale, avec à leur bord plus d’électronique et plus d’écrans, donc plus d’eau et d’énergie nécessaires à leur fabrication, plus de métaux, de terres rares, de plastiques, etc. L’ampleur des bénéfices est incertaine, les inconvénients sont assurés.

Réductionnisme technique

On touche ici au paradoxe le plus cocasse de la fabrique des politiques publiques européennes, dont chacune semble dotée de son gouvernail propre. Tandis qu’à un étage du Berlaymont on pédale fort pour aller vers le nord, on manœuvre âprement à l’étage du dessous pour mettre le cap au sud (d’où l’importance cardinale des porte-parole de la Commission, dont la tâche est ensuite d’échafauder des déclarations capables de nous convaincre que le nord et le sud se trouvent en réalité, plus ou moins, dans la même direction).

L’Union européenne s’est ainsi dotée d’objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre d’au moins 55 % à l’horizon 2030, mais contraint dans le même temps son industrie automobile à alourdir l’empreinte environnementale et climatique de ses voitures. On rétorquera que le mouvement en cours, fortement poussé par l’UE, est à l’électrification du parc. C’est juste. Mais l’énergie issue des renouvelables ou des centrales nucléaires n’est pas inépuisable : d’importants efforts de sobriété seront nécessaires dans tous les secteurs si l’on veut se passer des fossiles. Dans tous les secteurs, donc, sauf l’automobile – notons au passage qu’une petite Renault Zoe ou une Peugeot 208 électrique pèse 1,5 tonne, c’est-à-dire environ trois fois plus qu’une 2CV.

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