« Le stand-up est partout dans la société ! », lance Jessie Varin, directrice artistique de la péniche La Nouvelle Seine, scène tremplin pour les nouveaux talents de l’humour, au cœur de Paris. Il était aussi sur le parvis du Monde samedi 20 septembre. Après un débat interrogeant le lien entre humour et politique, animé par Magali Cartigny, Jessie Varin propose un plateau de quatre humoristes, venus interpeller – et faire rire – le public sur les mondes de demain, thème du festival 2025.
Frange courte, blazer rouge, énergie débordante, Adèle Barbers réveille le public : « Alors, si c’est drôle, on fait quoi ? » Quelques rires timides se font entendre. « On se croirait à un meeting de Valérie Pécresse là, vous pouvez faire mieux ! ». A 42 ans, Adèle Barbers est nouvelle dans le métier, passée par différentes voies, dont la politique. Pour elle, l’actualité est une matière première, après avoir travaillé une dizaine d’années dans plusieurs ministères et dans la diplomatie.
Son spectacle nommé Malàdroite tourne d’ailleurs autour de cette expérience personnelle. Pour s’inspirer, l’humoriste lit les médias – dont Le Monde – pour comprendre comment les spectateurs s’informent au quotidien. Elle avoue d’ailleurs être devenue la principale source d’information de certains de ses amis, ce qui ne la rassure pas.
« La tête du méchant »
T-shirt « Just married », casquette floquée « Make America Great Again », jupe à paillettes et rouge à lèvres rouge : l’humoriste suivante, Audrey Vernon, joue la carte de la provoc, expliquant au public « Comment épouser un milliardaire » (titre de son spectacle). « Oui, on veut savoir ! », lance le public, qui joue le jeu de l’interactivité du stand-up. Sensible à la liberté de la presse, elle refait ensuite le portrait de plusieurs milliardaires à travers le monde et invite alors l’assemblée à se questionner autant qu’à en rire.
Lui succède Umut Köker : sa marque de fabrique, c’est l’autodérision. « J’ai la tête du méchant », dit-il avant d’enchaîner des anecdotes sur les préjugés qu’il subit à l’égard de ses origines turques. « J’ai grandi dans un quartier et j’ai un bac + 5. (…) J’ai une double personnalité, je me considère comme un mec de la street… écoresponsable, ça veut dire que je brûle des voitures et que je fais le tri après. » Pour lui, en somme, une blague vaut mille débats. Parler de ses propres expériences, c’est un moyen de parler de ceux dont on ne parle pas, qui lui ressemblent et se reconnaissent en lui. Il n’a pas prétention d’être l’étendard d’une communauté mais une voix qui peut créer une identification.
Donel Jack’sman, entre en scène, avec une légère appréhension de jouer sur cet espace ouvert « le rire s’échappe en extérieur ». Il conquit même un couple de passants, qui vient s’installer pour l’écouter. « En temps de guerre, quels sont nos meilleurs éléments selon vous ? » Des réponses étonnantes fusent depuis la salle : Teddy Riner, les Marseillais, la nourriture française. Pour lui, ce seraient les banlieusards : « Ils ont déjà les armes, ce serait un gain de temps énorme », les agriculteurs et les chasseurs « qui ne savent pas faire la différence entre un cerf et un cycliste ». Le public est conquis. Bien que les réactions soient la plupart du temps bienveillantes, l’exercice du stand-up reste un jeu d’équilibriste, selon l’humoriste : « Le public attend des artistes que l’on affirme nos convictions et, quand on le fait, ils nous demandent de revenir à notre place. »
Pour Jessie Varin, directrice artistique de La Nouvelle Seine, mettre en lumière ces jeunes humoristes est essentiel pour créer du débat dans nos sociétés, car même « l’intime est politique ». Pour elle, autodérision et critique sont vitales « dans l’instantané du plateau, humoristes et public s’interrogent mutuellement sur le monde qui les entoure ».
Cet événement se déroule dans le cadre du Festival du Monde, qui a pour partenaires Axa, partenaire principal, l’Agence de la transition écologique, Leboncoin, Spotify, Vins de Bordeaux et le soutien de la mairie du 13e arrondissement de Paris, de la Paris Design Week et de l’Institut français de la mode. Pour y participer, suivez ce lien