Après le passage des équipes de nettoyage, la célèbre Bourbon Street, haut lieu de la vie nocturne de la Nouvelle-Orléans, en Louisiane, a presque retrouvé un aspect normal. Dans ce quartier animé, touristes, curieux ainsi que des supporteurs de football américain venus pour le Sugar Bowl – une finale universitaire – déambulaient, jeudi 2 janvier. Mais la forte présence policière et le survol des lieux par des drones des forces de l’ordre rappellaient le drame survenu dans la nuit du Nouvel An, quand un pick-up a sciemment foncé dans la foule, faisant quatorze morts et des dizaines de blessés.
Le bilan de quinze morts annoncé initialement par les autorités après l’attaque, que la police fédérale (FBI) traite comme un « acte terroriste », incluait le suspect, a précisé, jeudi, Christopher Raia, un haut responsable du FBI.
L’assaillant, tué lors d’échanges de tirs avec la police, s’appelait Shamsud-Din Jabbar, un citoyen américain du Texas de 42 ans, ancien employé dans l’armée américaine.
« Nous n’estimons pas à ce stade que d’autres personnes étaient impliquées dans cette attaque, à l’exception de Shamsud-Din Jabbar », a expliqué Christopher Raia, infirmant les premières hypothèses de la police fédérale.
Le suspect a proclamé dans plusieurs vidéos son soutien à l’organisation Etat islamique (EI) et a également affirmé avoir rejoint le groupe djihadiste, a ajouté le policier. Le FBI avait annoncé dès mercredi qu’un drapeau de l’EI se trouvait dans la voiture-bélier.
Des vidéos publiées avant l’attaque
Cinq vidéos ont été publiées mardi sur le compte Facebook de Shamsud-Din Jabbar dans lesquelles « il explique avoir prévu au départ de s’en prendre à sa famille et à ses amis, mais qu’il s’inquiétait que les titres des journaux ne se concentreraient pas sur, je cite : “La guerre entre les fidèles et les infidèles” », a raconté le responsable du FBI.
Le suspect avait également posé deux bombes artisanales. « On a obtenu des vidéos de télésurveillance qui [le] montrent en train de placer les engins là où ils ont été retrouvés » et désamorcés, a encore souligné M. Raia. Le président américain, Joe Biden, a quant à lui révélé que Shamsud-Din Jabbar avait un « détonateur à distance dans son véhicule » pour faire exploser ces engins placés dans des glacières.
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Le profil du suspect intrigue. Dans une vidéo datant de 2020, il vend avec un accent du sud des Etats-Unis ses services d’agent immobilier, assurant « être un négociateur acharné ».
« Bonsoir. Je suis Shamsud-Din Jabbar (…). Je suis né et j’ai grandi à Beaumont, au Texas, et je vis maintenant à Houston. Je suis resté ici toute ma vie, à l’exception de mes voyages pour l’armée », raconte-t-il fièrement sur son passé militaire. Dans cette vidéo, il pose devant un écran sur lequel est écrit en grand : « Discipline ».
Selon le ministère de la défense, il a été dans l’armée de 2007 à 2015, avec notamment un déploiement en Afghanistan de 2009 à 2010. A ce titre, il s’était vu décerner la médaille de la guerre contre le terrorisme créée pour les soldats envoyés en Irak et en Afghanistan après le 11 septembre 2001. Dans sa vidéo, Shamsud-Din Jabbar dit avoir « appris » dans l’armée « ce que signifie être réactif et prendre tout au sérieux (…) pour s’assurer que les choses se passent sans problème ».
Il avait travaillé pour le cabinet Deloitte et Touche de 2021 à 2024, a confirmé l’entreprise. Selon le Wall Street Journal, sur son profil interne de l’entreprise, il cite une sourate du Coran « qui explique comment les musulmans fidèles seront récompensés par Dieu ».
Pas de « lien irréfutable » avec l’explosion survenue à Las Vegas
D’après le quotidien américain, sa seconde épouse – il a divorcé deux fois – avait obtenu en 2020 une mesure d’éloignement. L’actuel mari de sa première compagne a, de son côté, affirmé au New York Times que le suspect s’était comporté de manière « erratique » ces derniers mois, « étant complètement fou ». Le couple avait interdit aux deux filles du suspect, âgées de 15 et 20 ans, de passer du temps avec lui.
Le FBI a aussi expliqué n’avoir pas établi de « lien irréfutable » entre l’attaque à la Nouvelle-Orléans et l’explosion, mercredi, d’une Tesla Cybertruck devant un hôtel Trump de Las Vegas (Nevada), qui a fait un mort. Mais le suspect est un militaire aux motivations encore inconnues, et les véhicules impliqués dans les deux événements avaient été loués sur l’application de partage entre particuliers Turo, laquelle coopère avec la police.
Le président élu, Donald Trump, qui a fait campagne sur la dénonciation de l’immigration illégale, avait fait le lien, sans attendre, avec les millions de clandestins aux Etats-Unis. Il a repris la même antienne, jeudi, en dénonçant la « vermine violente » qui s’est « infiltrée » partout aux Etats-Unis grâce, selon lui, à la politique de « frontières ouvertes » de Joe Biden.
De son côté, le président américain encore en fonction a loué « l’esprit » de la ville de Louisiane endeuillée. « Les habitants de la Nouvelle-Orléans envoient un message sans équivoque. Ils ne laisseront pas cette attaque ou les attaques, cette idéologie délirante nous vaincre », a-t-il déclaré lors d’une conférence de presse à la Maison Blanche.