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ARTE.TV – À LA DEMANDE – DOCUMENTAIRE

Ce documentaire commence sur une plage. Celle de Tunel Boca, au nord de Bilbao, au Pays basque espagnol. La particularité de ce lieu qui ressemble à tant d’autres, sur la côte Atlantique ? « C’est une plage “cimentée”, formée presque exclusivement de matériaux d’origine humaine », dit Alejandro Cearreta, chef de département géologie de l’université du Pays basque. Des « technofossiles », issus des déchets des hauts-fourneaux de la région, dans la première moitié du XXe siècle.

Une belle illustration de cet « anthropocène » théorisé par le Néerlandais Paul Crutzen (1933-2021), Prix Nobel de chimie en 1995 pour ses travaux sur la couche d’ozone. Un néologisme devenu générique pour désigner l’impact des humains sur la planète comme une nouvelle ère géologique.

Pour bien ancrer son sujet, le documentaire met en scène en parallèle des images d’acier en fusion sortant des hauts-fourneaux et de lave incandescente sortant de volcans, et pose la question fil rouge : « L’être humain serait-il devenu une force géologique capable de concurrencer les volcans, les séismes, les météorites ? »

Omniprésence des microplastiques

Les géologues et paléontologues se sont emparés du défi lancé par leur collègue chimiste. « La première question est : est-ce pertinent d’un point de vue géologique ? », interroge Philip Gibbard, secrétaire général de la Commission internationale de stratigraphie (ICS), qui s’est dotée en 2009 d’un groupe de travail sur l’anthropocène.

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Douze sites sont explorés sur toute la planète, des océans aux lacs, de la tourbe à la glace, pour « trouver dans les sous-sols les preuves d’un nouveau changement majeur », explique Colin Waters, de l’ICS. Les fonds marins sont en première ligne. Des forages dans la mer Baltique comme dans la baie de Beppu, au Japon, ont mis en évidence l’omniprésence des microplastiques, d’origine humaine. Des polluants invisibles qui tombent aussi avec la neige, « preuve qu’ils ont intégré le cycle de l’eau », selon Michinobu Kuwae, du Centre d’études de l’environnement marin d’Ehime (Japon). « Les sédiments sont comme des archives de la Terre », pour le géologue marin Jérôme Kaiser, de l’Institut Leibniz, à Rostock (Allemagne).

Sa consœur américaine Mary McGann explore, elle, la baie de San Francisco, « l’un des estuaires les plus envahis du monde, avec au moins 250 organismes différents. Quelque chose qui n’aurait pas pu se produire sans l’homme », affirme cette chercheuse de l’USGS Pacific Coastal and Marine Science Center. Les micro-organismes invasifs importés dans les soutes des porte-conteneurs ont des répercussions irréversibles sur toute la chaîne alimentaire locale.

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On découvre aussi la part d’ombre des coquillages appréciés des touristes, les palourdes. Celles qui sont venues du Japon avec les conteneurs se montrent d’« une voracité sans limites » pour le plancton local. A tel point qu’elles finissent par se mettre elles-mêmes en danger. « Un parallèle intéressant avec le comportement dévastateur des humains, conclut le paléontologue britannique Mark Williams, de l’université de Leicester. Rien ne nous arrête, et nous allons finir par connaître le même sort ! »

Anthropocène, l’implacable enquête, documentaire de Cécile Dumas et Cédric Defert (Fr., 2024, 59 min). Sur Arte.tv jusqu’au 17 mars. Sur Arte samedi 18 janvier à 23 h 20.

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