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En trois films, Ali Abbasi, cinéaste danois, né, en 1981, à Téhéran, est parvenu à attirer sur lui les lumières de la reconnaissance internationale. Après les très étranges Shelley (2016), Border (2018) et Les Nuits de Mashhad (2022), cet artiste magnétisé par les zones troubles atterrit sur le sol américain pour y adapter, en langue anglaise, The Apprentice, un scénario du journaliste politique américain Gabriel Sherman sur la relation d’amitié trahie entre Donald Trump et son mentor, l’avocat Roy Cohn (1927-1986).

Lire la critique : Article réservé à nos abonnés Et l’avocat Roy Cohn créa Donald Trump

Comment le scénario du journaliste américain Gabriel Sherman vous a-t-il été transmis ?

La productrice Amy Baer et Gabriel avaient commencé à développer ce projet, qui ambitionnait en quelque sorte de remonter aux sources du trumpisme en mettant au jour sa relation privilégiée avec l’avocat Roy Cohn, qui fut son mentor. Ils se sont rapidement rendu compte qu’un cinéaste américain avait toutes les chances de couler sa carrière en réalisant le film. L’idée d’avoir un regard étranger sur le sujet s’est donc imposée à eux.

N’avez-vous pas craint, en vous focalisant ainsi sur cette relation, de lui donner une trop grande importance dans le parcours de Donald Trump ?

C’est toujours le risque qu’on court quand on refuse de faire un biopic classique. Pour moi, ce film est un fragment de la vie de Trump, c’est vrai, mais qui dit, à mon sens, beaucoup sur lui. Il permet de l’approcher sous l’angle d’une histoire à la Frankenstein, en montrant comment le personnage que l’on connaît aujourd’hui s’est créé, où il s’origine.

On pourrait aussi penser à « Alien » : Trump se nourrit de Cohn, puis abandonne sa dépouille une fois la gestation achevée…

Absolument. La personnalité de Trump est suffisamment riche pour susciter bien des réminiscences. Que pensez-vous de Docteur Jerry et Mister Love [1963] ? Ou de Bob l’Eponge ? Sa capacité à se transformer, à se métamorphoser au gré des situations est, selon moi, essentielle pour comprendre le personnage.

Toutes ces références ont à voir avec le phénomène de la monstruosité…

Oui, mais vous savez bien que c’est nous-mêmes qui créons les monstres pour ne pas reconnaître notre propre monstruosité. C’est particulièrement vrai de cette partie de la société américaine, qui considère que Donald Trump est la cause des problèmes que traverse l’Amérique. Racisme, mauvaise éducation, etc. Mais lorsque vous chargez un personnage de tous les défauts de la terre, vous vous exemptez de toute responsabilité collective. Il me paraissait important, pour cette raison, de ne pas faire un film avec une bonne conscience de gauche. Je ne l’ai pas conçu comme une charge radicale contre Donald Trump.

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