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L’affaire avait bouleversé le monde du cinéma et ouvert la voie au #metoo français : le réalisateur Christophe Ruggia, accusé d’avoir agressé sexuellement l’actrice Adèle Haenel quand elle était mineure, a été condamné, lundi 3 février, à quatre ans de prison dont deux ferme aménagés sous bracelet électronique.  Le tribunal a aussi condamné le réalisateur à indemniser Adèle Haenel à hauteur de 15 000 euros pour son préjudice moral, et 20 000 pour ses années de suivi psychologique. Le réalisateur a aussitôt annoncé faire appel.

A l’issue de deux jours d’un procès intense, les 9 et 10 décembre 2024, l’accusation avait requis cinq ans de prison, dont deux ferme aménagés sous bracelet électronique à l’encontre du réalisateur, qui a contesté jusqu’au bout avoir agressé l’actrice entre ses 12 et 14 ans.

Adèle Haenel avait joué le rôle principal de son film Les Diables, une histoire de fugue perpétuelle d’un frère et d’une sœur qui tourne à l’inceste, avec des scènes de sexe entre les enfants et de longs gros plans sur le corps nu d’Adèle Haenel. Plusieurs adultes sur le plateau avaient dit leur « malaise » face au comportement « déplacé » du réalisateur alors presque quadragénaire avec son actrice.

Un processus toujours identique

Les agressions sexuelles qu’a dénoncées Adèle Haenel – publiquement dans Mediapart en 2019, déclenchant le mouvement #metoo dans le cinéma français – auraient débuté chez le réalisateur, après le tournage du film sous couvert de préparation de sa promotion. Et se seraient poursuivies quasiment tous les samedis après-midis pendant les années de quatrième et troisième de l’adolescente.

Lire le récit (en 2019) : Article réservé à nos abonnés Après la prise de parole d’Adèle Haenel, la nécessaire prise de conscience du cinéma français

A la barre, l’actrice, qui s’est mise aujourd’hui en retrait du cinéma, avait décrit le processus toujours identique des agressions. Elle assise sur le canapé, lui qui vient « se coller » l’air de rien au fil de la conversation parce que « ma puce [t’es] vraiment trop drôle ». Puis les mains qui passent sous le T-shirt, dans son pantalon. Après le « goûter », il la ramenait chez ses parents.

Droite comme un i à l’audience, elle avait cherché les mots pour décrire l’impossibilité de sortir de cet engrenage, face à un homme qui disait l’avoir « créée », qu’il n’avait « pas eu de chance de tomber amoureux d’elle », cette « adulte dans un corps d’enfant ».

« Mais ferme ta gueule ! »

L’actrice, qui avait péniblement contenu sa rage face aux dénégations répétées de Christophe Ruggia, se contentant de le fixer d’un regard noir qu’il évitait, avait fini par exploser la seconde après-midi de procès. Bondissant de son siège et dans un cri venu de loin, elle avait hurlé « mais ferme ta gueule ! », frappant des mains sur la table devant elle, figeant pendant quelques secondes une salle d’audience habituellement plus policée. Elle avait ensuite quitté la salle, comme en écho à son départ de la cérémonie des César en 2020 après le prix du meilleur réalisateur décerné à Roman Polanski, un geste qui l’avait érigée en symbole des féministes.

Soutenant qu’elle avait une « sensualité débordante » à 12 ans, Christophe Ruggia a pourtant assuré n’avoir « jamais » été « attiré » par Adèle Haenel. Les accusations portées contre lui ? Une « vengeance » car il aurait refusé de la faire jouer à nouveau. Et puis, « il fallait lancer un #metoo français, et c’est tombé sur moi ».

Lire l’enquête : Article réservé à nos abonnés La jeune fille au cinéma ou les ravages d’un mythe

Le Monde avec AFP

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