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Alors que François Bayrou a assuré, mardi, n’avoir « jamais été informé » des agressions sexuelles qui ont eu lieu dans un établissement catholique du Béarn, la gauche a mis la pression sur le premier ministre, mercredi 12 février, en s’appuyant sur la publication d’un deuxième article par Mediapart qui dénonce les « mensonges » du maire de Pau.

Le parquet de Pau mène l’enquête depuis un an sur une centaine de plaintes visant des faits présumés de violences, agressions sexuelles et viols commis au collège-lycée Notre-Dame-de-Bétharram, dans les Pyrénées-Atlantiques, entre les années 1970 et 1990. Le chef du gouvernement, originaire de la région, a scolarisé plusieurs de ses enfants dans cette institution et son épouse y a enseigné le catéchisme. Selon une enquête de Mediapart publiée le 5 février, il avait connaissance des faits, ce qu’il dément.

« Je n’ai jamais été informé de quoi que ce soit de violences ou de violences a fortiori sexuelles. Jamais », a toutefois affirmé, mardi, François Bayrou à l’Assemblée nationale, en réponse à une question du député de La France insoumise Paul Vannier. Mais le média d’investigation a publié mardi soir un nouveau volet à son enquête, affirmant le contraire.

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Appels à la démission

Interpellé une nouvelle fois sur le sujet dans l’hémicycle mercredi 12 février, François Bayrou a de nouveau dit qu’il « récusait » les accusations de mensonges le ciblant sur cette affaire. « Je vais redire ce que j’ai dit hier : jamais je n’ai été, à cette époque, averti en quoi que ce soit, (…) des faits qui ont donné lieu à des plaintes ou à des signalements », a déclaré le chef du gouvernement, en réponse au député écologiste Arnaud Bonnet qui l’a interpellé sur le sujet, tout comme l’« insoumis » Paul Vannier, quelques minutes plus tôt. « Je récuse les polémiques artificielles sur ce sujet », a ajouté le premier ministre, alors que les deux élus de gauche ont réclamé sa démission à la lumière des informations publiées.

Les députés socialistes ont, par ailleurs, estimé que François Bayrou « doit la vérité » aux victimes de cette affaire et à la représentation nationale, dans un communiqué de presse. « Des articles de presse publiés depuis apportent des éléments qui contredisent la version du premier ministre. S’ils étaient avérés, cela constituerait un mensonge et donc une faute grave », juge le Parti socialiste, qui demande au premier « de confirmer ou d’infirmer clairement ses propos pour contribuer à faire toute la lumière sur cette affaire dramatique ».

Les députés socialistes estiment également que le premier ministre, « en ne prononçant jamais le mot “victimes” pour les personnes concernées, a fait preuve d’une légèreté inacceptable ». Ils appellent M. Bayrou à « prendre conscience de la gravité de ces faits » qui ont eu lieu pendant près de soixante ans.

Courriers et rencontres

En avril 1996, alors que François Bayrou était ministre de l’éducation, une plainte avait déjà dénoncé les violences physiques d’un surveillant à Bétharram, condamné par la suite. Puis en mai 1998, alors qu’il était redevenu député des Pyrénées-Atlantiques et président du conseil général, un ancien directeur de l’institution avait été mis en examen et écroué pour viol.

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Des témoins interrogés par Mediapart puis sollicités par l’Agence France-Presse contredisent les dires de François Bayrou. Françoise Gullung, professeure de mathématiques à Bétharram de 1994 à 1996, dit avoir alerté à plusieurs reprises les autorités pour « dénoncer une atmosphère d’agressivité et de tensions anormales ». « J’en ai notamment parlé de vive voix à François Bayrou pour lui dire qu’il fallait être vigilant (…). Il a évacué mollement ce que je lui disais », affirme-t-elle, ajoutant lui avoir « également adressé un courrier au conseil général », qu’il présidait à l’époque.

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Selon Mediapart, en mai 1996, François Bayrou, alors ministre, avait organisé « une visite officielle dans l’établissement, un mois après le dépôt de la plainte de la victime et alors que l’affaire était largement commentée dans les médias ». Mediapart raconte qu’il avait alors « fait directement référence à cette première plainte et défendu Bétharram ».

Un nouveau courrier publié par « Mediapart »

Selon les informations du Monde et de La République des Pyrénées, l’actuel premier ministre avait rencontré, en 1998, le juge chargé d’instruire le dossier de viol à Notre-Dame-de-Bétharram. Cet ancien magistrat affirme qu’ils avaient évoqué l’affaire et a dit à Mediapart ne pas comprendre pourquoi François Bayrou le « dément aujourd’hui ». Enfin, Mediapart a publié mardi soir, le courrier adressé en mars 2024 au maire de Pau par une victime pour témoigner des violences subies dans l’établissement.

Mardi, le chef du gouvernement a exprimé sa « sympathie » pour « les personnes, les hommes ou les garçons, qui ont été en souffrance dans ces affaires-là ». Il a également avancé ce qu’il a présenté comme « deux preuves » de son ignorance. D’une part, « lorsque la première plainte est déposée », selon lui « en décembre 1997 », il a « quitté déjà le ministère de l’éducation nationale depuis des mois », soit en mai de la même année. Le premier ministre n’a pas évoqué la plainte datant de 1996, année où il était à la tête du ministère.

D’autre part, en confirmant avoir inscrit certains de ses enfants dans cet établissement, « qui a la réputation d’être strict », il a lancé : « Est-ce que vous croyez que nous aurions scolarisé nos enfants dans des établissements [où l’on aurait] soupçonné ou affirmé qu’il se passe des choses de cet ordre ? » « Je peux vous assurer que tout est faux et qu’une plainte en diffamation sera évidemment portée », a-t-il conclu, sans préciser qui serait visé par cette plainte.

Le Monde avec AFP

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