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Première économie du continent, l’Afrique du Sud exporte les deux tiers des véhicules qu’elle produit, dont une bonne partie vers les Etats-Unis. Le fruit d’un accord commercial qui semble en sursis, vu la récente rhétorique anti-Pretoria de Donald Trump.

« Je ne pense pas que l’Afrique du Sud ait une chance d’obtenir un renouvellement de l’AGOA [African Growth and Opportunity Act] ». Après des jours d’attaques de la nouvelle administration américaine, le pronostic du président de la chambre de commerce sud-africaine aux Etats-Unis, Neil Diamond, peut faire trembler la filière automobile.

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Ces quatre lettres sont le sigle d’un accord datant de 2000, offrant des conditions d’exportation préférentielles à de nombreux pays du continent. Depuis son entrée en vigueur, Washington exempte, par exemple, de droits de douane les voitures en provenance d’Afrique du Sud, premier bénéficiaire de cet accord.

Ce qui a débridé le volume de voitures exportées par Pretoria : 22 % des produits envoyés aux Etats-Unis par le pays sont des véhicules. Derrière les métaux précieux, c’est le deuxième secteur d’exportation à destination de Washington avec un total de 1,88 milliard de dollars, d’après le fisc sud-africain.

Quelque 125 000 emplois concernés

Sept grands constructeurs automobiles sont implantés dans le pays : BMW, Mercedes-Benz, Volkswagen, Isuzu, Nissan, Toyota et Ford. « C’est un demi-million de personnes qui sont employées dans l’industrie, en comptant toute la chaîne de valeur », explique à l’Agence France-Presse (AFP) le président de l’organisation patronale du secteur (Naamsa), Billy Tom.

Le non-renouvellement de l’AGOA, qui arrive à expiration en septembre 2025, aurait un effet dévastateur sur la filière. « L’impact serait important étant donné que les Etats-Unis sont notre troisième marché d’exportation et qu’il s’est développé au fil des ans », ajoute Billy Tom, par ailleurs PDG d’Isuzu en Afrique du Sud.

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Il estime à 86 000 le nombre d’emplois liés directement à l’AGOA chez les constructeurs et 125 000 en incluant leurs sous-traitants. A tel point que ces derniers sont souvent implantés sur les mêmes pôles industriels que les usines d’assemblage, comme à Rosslyn, près de Pretoria. « Cela aurait un effet très nuisible sur le réseau de fournisseurs et, à long terme, on peut s’attendre à ce que l’industrie ne survive pas en Afrique du Sud », juge, dans un entretien à l’AFP, le président de l’organisation des sous-traitants automobiles, Renai Moothilal.

Au-delà des critiques de la Maison Blanche sur sa récente loi sur l’expropriation, considérée par Washington comme discriminatoire à l’égard de la minorité blanche, Pretoria semble la cible parfaite. Le Sud-Africain de naissance Elon Musk, membre du premier cercle de Donald Trump, multiplie les attaques contre les « lois racistes » du pays. Et la politique étrangère de l’Afrique du Sud, que ce soit sa plainte pour génocide contre Israël et sa proximité avec la Russie ou la Chine, s’oppose à celle de Washington.

« Mesures très punitives »

« Le président Trump pourrait citer la clause de l’accord stipulant que les activités des bénéficiaires doivent être conformes aux intérêts de la sécurité et de la politique étrangère des Etats-Unis » pour exclure Pretoria de l’AGOA observe, pour l’AFP, Richard Morrow, analyste à la Brenthurst Foundation. Sous la présidence de son prédécesseur, Joe Biden, l’Ouganda, le Niger, le Gabon et la République centrafricaine ont par exemple été exclus de l’AGOA au 1er janvier 2024.

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Donald Trump pourrait aussi seulement exclure de l’accord ce secteur cher à son cœur, estime Richard Morrow, alors qu’il « a utilisé à plusieurs reprises l’automobile comme voyant témoin de l’économie américaine ». Car il s’agit d’un « secteur de cols bleus », proche de sa base électorale.

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Reste à savoir, souligne Richard Morrow, si l’administration Trump va poursuivre ses « mesures très punitives à l’encontre de l’Afrique du Sud » ou si elle « utilise l’AGOA comme un moyen d’intimider l’Afrique du Sud pour influencer sa politique étrangère ».

L’ironie de la situation est que la majorité des patrons sud-africains ont un positionnement politique « aligné sur l’Occident », et en particulier sur Washington, note, auprès de l’AFP, Isaac Khambule, professeur d’économie politique à l’Université de Johannesburg. Mais ils souffrent déjà des menaces américaines. « Cela ne fait pas un mois que Trump a été investi et on constate déjà un impact sur l’activité et l’environnement économiques », assure Neil Diamond.

Le Monde avec AFP

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